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À Hong Kong, la nouvelle loi sécuritaire prévoit la prison à vie

Les crimes contre la sécurité nationale pourront être passibles de la prison à vie à Hong Kong où la justice chinoise sera désormais compétente pour les plus "graves" d’entre eux, d’après une nouvelle loi adoptée mardi 30 juin au pas de charge à Pékin.

Les crimes contre la sécurité nationale pourront être passibles de la prison à vie à Hong Kong où la justice chinoise sera désormais compétente pour les plus “graves” d’entre eux, d’après une nouvelle loi adoptée mardi 30 juin au pas de charge à Pékin.

Toute infraction à la nouvelle “loi sur la sécurité nationale” destinée à lutter contre la subversion, le terrorisme, le séparatisme et la collusion avec des forces étrangères à Hong Kong sera passible de la réclusion à perpétuité, rapporte mardi 30 juin Chine nouvelle.

Cette législation qui fait craindre à l’opposition hongkongaise un recul inédit des libertés depuis la rétrocession de 1997 par le Royaume-Uni de ce territoire, qui dispose d’un statut d’autonomie, y prévoit aussi la mise en place par Pékin d’une agence pour la sécurité nationale.

“Un glaive suspendu au-dessus de la tête”

Condamnée le même jour par 27 pays à l’ONU, dont la France, le Royaume-Uni, l’Allemagne et le Japon, après l’avoir été par l’Union européenne et les États-Unis, accusée par ses détracteurs d’être une tentative de museler l’opposition à Hong Kong, elle a été promulguée par le président chinois Xi Jinping après avoir été entérinée par le Comité permanent du Parlement, une instance soumise au Parti communiste chinois (PCC).

“Pour les membres de la petite minorité qui menace la sécurité nationale, cette loi sera un glaive suspendu au-dessus de leur tête”, a averti dans la foulée le gouvernement chinois.

La cheffe de l’exécutif hongkongais fidèle à Pékin, Carrie Lam, a précisé que la loi entrait en vigueur dès mardi. Soit un an après le début des manifestations monstres dans l’ex-colonie britannique contre l’influence du gouvernement central. Echaudée par ces événements, la Chine aura imposé en quelques semaines seulement cette loi qui contourne le conseil législatif local.

Pour le gouvernement central, il s’agit avec ce texte d’assurer la stabilité, de mettre fin au vandalisme ayant émaillé les manifestations de 2019 dans ce territoire de 7,5 millions d’habitants, ainsi que d’y réprimer le courant militant pour l’indépendance.

“Cela marque la fin de Hong Kong tel que le monde la connaissait”, a réagi sur Twitter Joshua Wong, l’une des figures du mouvement pour la démocratie. “La ville se transformera en un #étatdepolicesecrète.”

Conséquence, le parti Demosisto, qu’il a fondé avec d’autres militants en 2014, a annoncé sa dissolution. Cette formation appelait notamment à l’auto-détermination et pouvait donc potentiellement tomber sous le coup de la nouvelle loi.

Agence de sécurité nationale

Le texte permet de réprimer quatre types de crimes contre la sécurité d’État : les activités subversives, la sécession, le terrorisme et la collusion avec des forces étrangères visant à mettre en danger la sécurité nationale.

Dans ce domaine, la Chine continentale peut directement prendre en charge les dossiers dans trois hypothèses : s’il s’agit d’affaires complexes d’ingérence étrangère, si les cas sont “très graves” et si des “menaces graves et réelles” pèsent sur la sécurité nationale.

Pékin a à cet égard plusieurs fois accusé des pays occidentaux de jeter de l’huile sur le feu à Hong Kong en soutenant les manifestants.

“À la fois l’agence de sécurité nationale et (les autorités de) Hong Kong peuvent demander de renvoyer l’affaire en Chine continentale et les poursuites seront engagées des procureurs désignés par le Parquet populaire suprême (chinois) et le procès se déroulera dans un tribunal désigné par la Cour suprême” de Chine, d’après le texte.

“Les auteurs de (crimes) graves seront condamnés à la prison à vie ou à un minimum de dix ans d’emprisonnement”, toujours en vertu de la nouvelle législation.

En outre, “le gouvernement de Hong Kong n’a pas autorité sur l’agence de sécurité nationale à Hong Kong et son personnel lorsqu’ils s’acquittent de leurs obligations prévues dans cette loi”. Elle souligne aussi que certaines de ces affaires pourront être jugées à huis clos si des secrets d’État sont en jeu.

27 pays condamnent

La décision de confier à des organismes étatiques chinois des prérogatives dans ce territoire autonome inquiète fortement l’opposition locale car la séparation des pouvoirs n’existe pas en Chine continentale, dirigée par le PCC.

Depuis plus de vingt ans, Hong Kong jouit en effet d’une large autonomie, en vertu du principe “Un pays, deux systèmes”, ses habitants bénéficiant de la liberté d’expression, de la liberté de la presse et d’une justice indépendante.

Par ailleurs, le fait que le contenu de la nouvelle loi n’ait été rendu public qu’après-coup a irrité l’opposition hongkongaise. C’“est véritablement absurde”, s’est ainsi insurgée Claudia Mo, une parlementaire locale.

Les gouvernements occidentaux disent de leur côté s’inquiéter pour le statut international de la ville, l’une des principales places financières mondiales. “Cette loi risque de porter gravement atteinte au degré élevé d’autonomie de Hong Kong” , a par exemple estimé le président du Conseil européen, Charles Michel.