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Source : Néon
Voir le panoramaFrance : l’Enap, l’école qui forme les surveillants de prison
Simulation d’évasion, passage de menottes, cours de fouille de cellule… 2 000 surveillants de prison sont formés chaque année à l’Ecole nationale d’administration pénitentiaire. Reportage devant et derrière les barreaux.
Agen. Mardi 10 avril. Le ciel est clair. Dans la cour de promenade en contrebas, tout est calme. Alexia est en poste au mirador de la prison quand un bourdonnement attire son attention. Dans le ciel, un point noir apparaît au loin. Equipée d’un gilet pare-balles, elle se lève, fait coulisser la vitre qui lui fait face, et fixe ce qui se révèle vite être un hélicoptère avançant à vive allure dans sa direction. Elle saisit son HK, un fusil d’assaut à longue portée, et vise. Un filin vient d’être lancé depuis l’engin tandis qu’un détenu surgit sur le toit de l’établissement. Pourtant, Alexia ne tire pas. Au poste central d’information qui lui demande de décrire ce qu’elle voit, elle explique un peu confusément la situation. Alors que le stress fait chevroter sa voix, le détenu a réussi à attraper le filin. Alexia tire enfin, mais c’est trop tard, il est déjà dans les airs. Fin de l’exercice.
Alexia est une élève, son HK n’est pas chargé et l’évasion à laquelle elle vient d’assister se déroule sur un écran et non dans une réelle prison. Carole, la formatrice, queue-de-cheval haute et Sig-Sauer 9 mm à la ceinture, demande à la jeune femme ce qu’elle a ressenti. “J’étais concentrée sur l’hélicoptère et je n’ai pas vu le détenu courir sur le toit”, explique l’élève. “Ça s’appelle l’effet tunnel, répond la formatrice, on est tellement focalisé sur un endroit qu’on ne voit pas ce qui se passe ailleurs.“
Dans la panique, Alexia a également oublié d’énoncer à voix haute les sommations obligatoires : “Halte ou je tire !”
Pendant une heure, la vingtaine d’élèves du groupe enchaîne les simulations, avec plus ou moins de succès. Yanisse, lui, n’hésite pas à tirer, mais sur la mauvaise personne, en l’occurrence sur le complice qui lançait la corde plutôt que sur le détenu qui tentait de l’attraper. Dans cinq mois, ces élèves prendront leur premier poste en détention. Et quand on demande à la formatrice s’ils sont susceptibles d’être affectés au mirador, elle répond : “Logiquement on essaye d’éviter, mais dans les établissements où il y a beaucoup de stagiaires, il n’y a pas le choix.” Car avant d’être titularisés, les surveillants sont considérés comme stagiaires pendant un an. Ça n’effraie pourtant pas Alexia : “C’est super rapide. Il faut regarder partout. Mais le tir, j’adore ça.”
lexia a 21 ans et est originaire d’Isère. Comme les 262 autres élèves surveillants, elle a fait sa rentrée en janvier à l’Ecole nationale de l’administration pénitentiaire (Enap). Un campus à l’américaine qui déploie sur 16 hectares ses grandes pelouses parfaitement tondues, ses amphis et ses 41 salles de cours, son gymnase, son stand de tir, son bâtiment de simulation et ses trois villages d’hébergement. Depuis 2000, c’est ici, en périphérie d’Agen, que l’administration a délocalisé la formation de tous ses personnels : surveillants mais aussi gradés, directeurs, secrétaires au greffe, moniteurs de sport, conseillers d’insertion… Pendant trois jours, logés sur place dans les chambres à la déco fruste de la ZAC de Trenque, nous suivons les groupes 3 et 4 de la 196e promotion, l’une des trois accueillies par l’école cette année. Alternant cours et stages sur le terrain, ils ont huit mois pour se former. Et le programme est costaud : droit, psychologie, prévention du suicide, tir, secourisme, détection d’objets interdits… Les élèves sont évalués toute l’année sur leur capacité à réaliser un garrot, éteindre un feu de cellule, repérer une lame cachée dans une semelle ou maîtriser le code de procédure pénale.
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