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Source : Têtu
Voir le panoramaLa France Insoumise veut améliorer les conditions de détention des personnes trans’
Les député.e.s de La France Insoumise ont déposé deux amendements, dans le cadre de la loi sur la programmation de la Justice. L’un vise à faciliter le changement d’état civil pour les personnes trans’. L’autre concerne une thématique dont aucun parti politique ne s’est jamais vraiment saisi jusqu’alors : celle des conditions de détention des personnes transgenres.
Pallier un manquement législatif qui peut avoir de graves conséquences sur le quotidien des personnes trans’ en prison. Tel est l’objectif des députés de la France Insoumise, qui ont déposé ce 14 novembre un amendement inédit, dans le cadre du projet de loi de programmation pour la Justice.
Une incarcération en fonction du genre déclaré
Celui-ci prévoit tout d’abord d’ajouter un alinéa à l’article 724 du code de procédure pénale : “La mise à l’écrou est effectuée en fonction de l’identité de genre déclarée de la personne condamnée, indépendamment du genre indiqué à l’état civil au moment de la condamnation”.
Il propose également de compléter l’article 47 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009, à propos de la prise en charge sanitaire des femmes détenues : “Toute personne incarcérée est accompagnée, si elle le souhaite, dans la poursuite ou le commencement de sa transition masculine ou féminine par un corps médical compétent et des associations de personnes concernées. Toute personne détenue a aussi le droit de transitionner administrativement. Elle est accompagnée, si elle en exprime le souhait, dans ses démarches. L’interdiction d’accès d’une association de personnes concernées à toute personne détenue ne peut se fonder que sur des motifs impérieux d’ordre public”.
“Réparer une maltraitance institutionnelle”
Cet amendement “vise à permettre aux personnes détenues d’être au moins traitées avec un minimum de dignité, en leur permettant d’être incarcérées dans un établissement pénitentiaire correspondant à leur genre vécu”, avancent les parlementaires dans l’exposés des motifs. A l’heure actuelle, les personnes transgenres sont détenues en fonction de leur état civil. Autrement dit, celles dont les papiers d’identité mentionnent un genre féminin vont en prison pour femme, et vice-versa. Peu importe leur apparence et leur identité de genre déclarée et vécue.
Si certains aménagements sont mis en place, pour les personnes ayant bénéficié d’une opération dite “de réassignation génitale” notamment, cela reste aujourd’hui au bon vouloir des directions d’administrations pénitentiaires. “Chaque prison fait sa propre cuisine”, expliquait sur BuzzFeed François Bès, coordinateur du pôle enquêtes à l’Observatoire international des prisons (OIP).
En conséquence, des femmes trans’ se retrouvent régulièrement incarcérées en établissements pour hommes, où elles sont davantage exposées aux discriminations en tout genre et aux violences. Négation totale de leur identité, difficile accès à des soins spécifiques, transphobie exacerbée, placement à l’isolement… L’application stricte de la loi actuelle peut être lourde de conséquences.
“Cet amendement vise ainsi à réparer – un peu – cette maltraitance institutionnelle”, expliquent les députés La France Insoumise dans l’exposé de l’amendement numéro 546.
“C’est une première”
“Le premier article est positif et c’est une première, car pour l’instant il n’y a rien sur ce point dans la loi”, commente auprès de TÊTU Giovanna Rincon, directrice de l’association Acceptess-T, qui accompagne régulièrement des personnes trans’ incarcérées. “Mais pour moi, cet amendement manque de clarté, sur la définition de la ‘transition administrative’ notamment”, nuance-t-elle néanmoins.
En ne mentionnant par ailleurs que les “personnes condamnées”, la France Insoumise exclut de fait les prévenu.e.s, incarcéré.e.s en maison d’arrêt dans l’attente de leur procès. “Cet amendement n’a pas la prétention de résoudre tous les problèmes que rencontres les personnes transgenres dans le système carcéral, précise à TÊTU une collaboratrice de Danièle Obono. C’est un point d’appui pour amener la discussion et alerter sur cette situation.”
Déjudiciariser le changement d’état civil
Le second amendement présenté par les députés LFI “vise à déjudiciariser la procédure de changement de sexe à l’état civil”, en modifiant ainsi l’article 61-5 du code civil : “L’officier d’état civil modifie la mention du sexe à la demande de toute personne âgée de 16 ans ou plus. Cette modification peut être effectuée deux fois”.
Depuis la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, les personnes trans n’ont, en principe, plus à produire de documents médicaux pour faire une demande de changement d’état civil. Elles doivent néanmoins toujours passer devant un juge.
Reste à savoir si ces deux amendements vont tout d’abord être jugés recevables, puis s’ils seront adoptés.
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