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Source : Tribune de Genève
Voir le panoramaSuisse : un débat sur la réinsertion des prisonniers relancé
Incarcéré à vie à Lenzbourg pour un triple meurtre, Guido S. veut obtenir un diplôme en milieu carcéral. Sa demande déclenche un débat sur la réinsertion des prisonniers.
Un meurtrier suscite la controverse en Argovie. En effet, Guido S. incarcéré à la prison de Lenzbourg depuis 10 ans, veut avoir la possibilité de faire un apprentissage et obtenir un certificat fédéral d’aptitude professionnelle. Hic: les formations couronnées de diplôme sont pratiquement inexistantes en milieu carcéral. Et sa demande suscite un vif débat autour de la réinsertion professionnelle des prisonniers, relate samedi l’Aargauer Zeitung.
La question est d’autant plus importante que Guido S. a commis un crime particulièrement grave à Granges (SO). Avec deux autres complices, il a tué en juin 2009 trois personnes, un couple de 55 et 60 ans et leur fille handicapée mentale. C’est d’ailleurs Guido qui avait étouffé cette dernière avec un sac poubelle. L’affaire avait choqué la population à l’époque et les trois criminels avaient été condamnés à la réclusion à perpétuité en 2012. Des jugements confirmés par le Tribunal fédéral en 2015.
Bien sûr, une réclusion à perpétuité peut durer toute la vie. Mais après 15 ans, une révocation du jugement peut être examinée à condition que la personne condamnée ne soit plus considérée comme un danger pour la société.
Guido S., âgé aujourd’hui de 34 ans, passera cet examen dans 5 ans. Et pour le moment, il n’est pas considéré comme un danger dans sa prison de Lenzbourg. Il dit même “regretter profondément” ses actes.
Formation dans l’intendance
Aujourd’hui, le meurtrier a découvert les joies de la formation en prison. Jeune, il n’a pourtant jamais achevé ses apprentissages d’électricien puis de plâtrier. A Lenzbourg, il travaille dans l’intendance et le ménage du pénitencier depuis 7 ans, une formation pratique interne qui n’est pas reconnue par un diplôme. Raison pour laquelle il veut passer un examen et obtenir un certificat. «Je n’aurai jamais autant de temps que maintenant pour apprendre. Pourquoi devrait-on me le refuser?», dit-il au journal.
Et le meurtrier, qui étudie avec application dans sa cellule, s’est bien documenté pour effectuer sa demande. Il cite l’article 82 du Code pénal : «Le détenu doit avoir la possibilité de recevoir une formation et un perfectionnement en fonction de ses capacités, à condition qu’il soit apte». L’objectif étant de préparer les détenus à leur future vie en liberté.
Soutien des uns
Les spécialistes de l’éducation le soutiennent dans sa démarche. Du coup, il passera un examen oral en éducation générale dans sa prison dans trois semaines. Ce qui pose problème en revanche, c’est l’examen pratique. Pour le passer, soit il devra sortir de prison et être accompagné de policiers. Soit les experts devront se déplacer à Lenzbourg pour tester ses compétences. Les deux variantes n’ont jusqu’ici pas obtenu les autorisations nécessaires.
Pour l’instant Guido S. a reçu le soutien des autorités cantonales d’Argovie et de Soleure. “Il faut vraiment penser à la réintégration ultérieure de Guido S. Il ne sert à rien de lui refuser son diplôme et de s’attendre à ce qu’il puisse se réinsérer dans la société plus tard sans aucun problème”, écrit ainsi un responsable argovien. Mais les responsables de la sécurité des cantons sont opposés. Selon eux, Guido S. ne remplirait pas les critères, car il n’a pas suivi de thérapie. Or, on a diagnostiqué un “trouble dissocial schizoïde de la personnalité avec une grande froideur émotionnelle”, explique-t-on. Il serait ainsi susceptible de commettre d’autres crimes et il est donc trop tôt pour le faire sortir de cellule.
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