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Yémen : un site de Total utilisé comme prison

Sur la route côtière qui lie l’est du Yémen au reste du monde, le long du golfe d’Aden, l’usine de Balhaf a des allures de vaisseau spatial à l’échouage. Le groupe français Total est actionnaire à 39,6 % de cet immense complexe gazier, opéré par l’entreprise locale Yemen LNG. Une usine de liquéfaction du gaz y est accolée à un port et à un gazoduc, qui parcourt sur plus de 300 km un plateau désertique, en direction des champs de production du nord du pays.

Ce site industriel a été mis à l’arrêt au printemps 2015, dès le début de la guerre au Yémen. Total ignore quand il pourra relancer les exportations vers l’Asie d’une usine qui a coûté 4,3 milliards d’euros, et qui assurait depuis 2009 jusqu’à 45 % des recettes budgétaires de l’Etat yéménite.

Les environs ne sont pas sûrs : les djihadistes d’Al-Qaida s’y sont imposés dès 2015, puis l’armée des Emirats arabes unis les a pourchassés, enrôlant des forces tribales locales. Total et Yemen LNG se veulent neutres, dans ce conflit qui oppose bien d’autres acteurs et qui a fait 100 000 morts depuis 2015, selon un décompte de l’ONG américaine Acled. Cependant, la guerre a fini par s’immiscer à l’intérieur du site industriel lui-même, et par impliquer le groupe énergétique français.

Depuis deux ans, des témoignages recueillis par l’organisation Amnesty International, par le panel d’experts sur le Yémen des Nations unies ainsi que par des ONG et des activistes yéménites ont fait état de l’existence d’un lieu de détention à Balhaf, administré par les forces émiraties au sein d’une base militaire. Celle-ci a été aménagée par les Emirats à la mi-2017 sur une partie du site industriel de Total, réquisitionnée à la demande officielle du gouvernement yéménite.

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