Belgique  : crise ordinaire, crise sanitaire

Olivia Nederlandt. Les autorités belges ont adopté trois types de mesures en ce qui concerne les établissements pénitentiaires. Le risque de propagation du coronavirus y est accru puisque la population détenue vit dans la promiscuité, mais aussi, au sein de certains établissements, dans des conditions d’hygiène déplorables. En premier lieu, des mesures ont visé à réduire la population carcérale, notamment par la suspension de la mise à exécution de certaines peines d’emprisonnement inférieures ou égales à cinq ans et par l’octroi de libérations temporaires et anticipées de prison.

En second lieu, des mesures ont eu pour objectif de limiter les entrées et sorties de prison.

Cela s’est traduit notamment par la suspension des visites des proches, la suspension des courtes sorties de prison (permissions de sortie et congés pénitentiaires) et la représentation par l’avocat des détenus à certaines de leurs audiences.

En troisième lieu, des mesures sanitaires ont été adoptées au sein des établissements pénitentiaires (isolement préventif ou médical, port du masque, regroupement des détenus en “bulles“ pour les visites ou l’accès à certaines activités, etc.).

ON. Il est difficile de répondre de façon brève à cette question car cela dépend non seulement des mesures prises mais aussi du moment où elles ont été prises. Globalement, les mesures visant à réduire la population carcérale peuvent être jugées insuffisantes puisque les conditions pour accéder aux libérations temporaires et anticipées étaient très restrictives. Elles ne visaient par ailleurs que les personnes condamnées et non les personnes en détention préventive¹… alors que ce sont les maisons d’arrêt qui sont les établissements les plus vétustes, surpeuplés et dans lesquels le risque de propagation est donc le plus important. On peut comprendre la réaction des autorités face à l’urgence et un virus inconnu lors du confinement imposé au début de la première vague. Mais la suspension des visites, des courtes sorties de prison permettant aux détenus de préparer leur réinsertion et des transferts des détenus à leurs audiences semblent disproportionnées lors de la seconde vague. Des mesures moins attentatoires aux droits des détenus auraient en effet pu être adoptées.

ON. La plupart des mesures décrites dans la contribution (publiée en mars 2021) ont été prolongées suite à l’arrivée de la troisième vague fin mars 2021 (les mesures de la première vague s’étendent de mi-mars à mi-juin 2020 et de la seconde vague de fin octobre 2020 au 31 mars 2021). Toutes les mesures prévues par la loi coronavirus ont en effet été prolongées jusqu’au 30 juin 2021 et la libération temporaire de prison (interruption de l’exécution de la peine) jusqu’au 15 juillet 2021. A ce jour, aucun texte légal ne prévoit d’encore les prolonger au-delà de ces dates. Aucune nouvelle mesure spécifique n’a été adoptée, si ce n’est que la campagne de vaccination a été lancée pour les prisons. Dans un premier temps, la conférence interministérielle Santé Publique a pris la décision de vacciner de façon prioritaire uniquement le personnel pénitentiaire et non les détenus – ce qui a été fortement critiqué et amené le professeur Tom Daems à rappeler le principe de “less eligibility“. La vaccination des détenus “à risque “ n’a cependant débuté que fin mai 2021. La population carcérale n’a donc pas été considérée comme une population prioritaire, ce qui est critiquable au vu du risque de propagation accru dans les établissements fermés.