RG. Quand la nouvelle droite, ou la dite vague conservatrice, est arrivée au pouvoir (comme le gouvernement de Jair Bolsonaro à l’échelle nationale et des gouverneurs tels que Wilson Witzel dans l’État de Rio), l’agenda politique envisagé pour le système pénitentiaire encourageait la privatisation des établissements. Un tel mouvement avait démarré dans plusieurs États. Cependant, dans le contexte de la pandémie et de la crise économique généralisée, la privatisation n’est plus au cœur des priorités.
Nous sommes à présent confrontés à un contexte marqué très fortement par la pandémie, par son évolution et par une politique de sous-déclaration délibérée (des cas positifs et des décès), à l’échelle du pays, et, ce qui est encore plus grave, à l’échelle des prisons.
L’État brésilien ne veut rien savoir, rien mesurer. Il se préoccupe davantage du contrôle des informations que du contrôle de la pandémie. Cela se traduit par une plus grande opacité du système pénitentiaire et une forte détérioration des conditions de vie en détention. On constate également une hausse des tensions et des conflits entre détenus et personnels.
Les agents manquent eux aussi d’assistance. Ils se retrouvent sans matériel de protection individuelle et sont exposés à une énorme charge virale.
À São Paulo, le système pénitentiaire a été « fermé » dès le mois de mars : suspension des visites, de la livraison de nourriture et des produits d’hygiène, annulation des permissions de sortir et confinement des détenus en semi-liberté. Des mutineries ont éclaté dans plusieurs prisons. Récemment, une s’est produite dans l’État d’Amazonas.
Si, auparavant, nous assistions à des mutineries causées par des règlements de compte, les insurrections les plus récentes ne trouvent pas leur origine dans des conflits entre prisonniers. Les détenus et leurs familles ont d’ailleurs bien tenu à préciser qu’il ne s’agissait pas de règlements de compte entre détenus, mais de manifestations organisées pour demander une plus grande attention de la part des autorités aux questions sanitaires en détention. Par conséquent, on peut dire que ce contexte d’exacerbation des conflits semble se redéfinir avec la pandémie : nous assistons en fait à une réduction des tensions entres les gangs.
À l’extérieur, nous observons une mobilisation collective croissante des proches et familles des personnes détenues Ces derniers revendiquent une politique de “désincarcération” et de respect des droits humains. Il s’agit d’un mouvement social très divers, très fort et essentiel pour exercer une pression sur les administrations pénitentiaires et les tribunaux des États. L’enjeu est d’encourager la libération des personnes détenues à risque. La mobilisation des familles est très importante car elle permet de maintenir des conditions d’hygiène de base au sein des prisons. Ce sont elles qui envoient à leurs proches incarcérés ce que l’État ne prévoit pas, comme de l’eau de javel, du savon ou encore des masques : tout ce dont une personne a besoin pour se protéger et qui est indispensable dans un foyer de contamination.