Au départ, nous ne voulions pas que les filles visitent leur père, car cela ne pouvait se faire qu’à travers une vitre. Émile a été transféré à plusieurs reprises dans différents établissements. C’était une période compliquée pour nous. À chaque fois qu’il changeait de prison, cela impliquait des coûts. Quand il nous appelait, c’était toujours à nos frais, ça coutait excessivement cher.
Il a finalement été envoyé, après son procès, dans une prison de sécurité moyenne, à environ deux heures de chez nous. L’arrivée dans cet établissement nous a coûté près de trois mille dollars : c’est nous qui avons payé toute une série d’objets pour son arrivée. La radio, le ventilateur, ça va vite. Notre fils a été chanceux, parce que ceux qui n’ont pas les moyens ne peuvent pas se permettre de dépenser une telle somme.
Il s’est écoulé presque un an entre l’incarcération d’Émile et l’autorisation de la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) nous permettant d’amener les filles au parloir. Quand le moment est arrivé, cela faisait presque deux ans qu’ils ne s’étaient pas vus. C’était chargé d’émotion. Quand nous étions sur le point de partir, une des filles pleurait. Un surveillant s’est approché d’elle et lui a dit : “tu as le droit de pleurer, d’avoir de la peine mais tu sais, ton papa il va s’en sortir”. Ça l’a consolé, qu’il lui dise ça. C’est là qu’on se rend compte qu’il y a de bons gardiens et de moins bons. Ce qui est dommage, c’est que les moins bons nous affectent beaucoup, parce qu’on se sent visé. En tant que proches, nous sommes considérés comme des parias de la société, comme si nous étions responsables de ce que notre proche incarcéré a fait.