AG. L’idée de cette recommandation, c’est l’adoption d’une mesure suffisamment contraignante pour enfin sortir de l’inertie si caractéristique de la France vis-à-vis de la situation dans les prisons. Comment faire pour redonner de l’autorité à un principe arithmétique de base : 100 places de prison c’est donc 100 personnes détenues au maximum. Les personnalités politiques prônent systématiquement la construction de nouvelles prisons et l’augmentation du nombre de places comme solution. Or, depuis toujours, la pratique nous rappelle qu’en France, quelle que soit la jauge réelle des établissements pénitentiaires, la surpopulation est une réalité qu’aucune politique publique ne parvient à corriger.
En France, le réflexe, c’est de s’évertuer à incarcérer 300 détenus dans une maison d’arrêt de 200 places. Par conséquent, augmenter le nombre de places de prison ne résout rien, ça ne fait qu’élever la jauge maximale qui sera, dans les faits, dépassée.
La Commission recommande donc l’adoption d’un mécanisme de régulation carcérale contraignant à plusieurs niveaux, consistant en une idée très simple : ne pas remplir les prisons au-delà de leur jauge. Cette décision s’avère indispensable pour endiguer d’une part et prévenir d’autre part la surpopulation.
Dans cet avis, la Commission fait la différence entre d’une part, des mécanismes à effet immédiat tels que des mesures de libération anticipée (à la manière de ce qui avait été fait pendant la pandémie de Covid-19 en 2020) pour réduire la pression carcérale, sans attendre. Et d’autre part, des mesures à plus long terme consistant à poser un principe d’interdiction applicable à tout établissement pénitentiaire de dépasser un taux d’occupation de 100 %. Cette recommandation est également portée par le Contrôleur des lieux de privation de liberté (CGLPL). Une telle mesure doit être inscrite dans la loi pour avoir un caractère contraignant, afin de s’imposer tant aux magistrats qu’à l’administration pénitentiaire. Plus concrètement, cet avis “prison” entend limiter les entrées et favoriser les sorties, en utilisant un seuil d’alerte permettant d’anticiper et donc d’éviter de dépasser les 100 % d’occupation. À l’approche de ce seuil d’alerte, des mesures de libérations ou d’aménagements de peine doivent être mises en place pour les personnes les plus proches d’une sortie.
Cette approche nécessite de réorienter les moyens mis à disposition de la Justice. Plutôt que d’augmenter le nombre de places en construisant de nouvelles prisons, ce qui immanquablement conduit à augmenter encore et toujours le nombre de personnes incarcérées, la CNCDH recommande de flécher le budget vers la rénovation des établissements vétustes et vers de véritables dispositifs d’accompagnement permettant de sanctionner différemment, hors des murs de la prison. Cet avis appelle donc à un véritable changement de paradigme pour entériner une politique de déflation carcérale.