Le Liban compte 6 382 personnes détenues, dont la moitié dans la seule prison de Roumieh. L’établissement compte trois fois plus de prisonniers que de places. Plus de la moitié des personnes incarcérées le sont dans l’attente de leur jugement. Elles peuvent l’attendre des mois ou des années, bien au-delà des limites prévues par la loi.
L’administration des prisons est sous la responsabilité du ministère de l’Intérieur. Son transfert au ministère de la Justice n’est toujours pas effectif. Le personnel pénitentiaire se compose des membres des Forces de sécurité intérieure (FSI), un corps de la police nationale qui ne dispose pas de formation spécifique au métier de surveillant. Quelques établissements et quartiers sont sous la responsabilité de l’armée.
Des cas de mauvais traitements et de torture sont rapportés. Ceci en dépit de la promulgation, en 2017, de la loi qui criminalise la torture. Des ONG dénoncent des cas d’abus envers des personnes LGBTQI. Celles-ci ne bénéficient d’aucune protection particulière et subissent des violences de la part de leurs codétenus et du personnel. Les organisations Human Rights Watch et Amnesty International dénoncent, en 2021, une cinquantaine de cas de torture, notamment à l’encontre de détenus syriens pour l’obtention d’aveux. Un mécanisme national de prévention de la torture est créé, en 2016, au sein de la Commission nationale des droits de l’homme. Ses membres sont désignés en 2019. L’institution n’est toujours pas opérationnelle, faute de reconnaissance officielle de ses fonctions et de financement.
Le Liban connaît, depuis 2019, une crise économique sans précédent. Le PIB par habitant chute de 40 %, la monnaie voit sa valeur divisée par dix, une partie de la population peine à se nourrir correctement. La Banque mondiale estime qu’il s’agirait d’un des trois pires effondrements économiques mondiaux depuis 1850. Une double explosion dévaste, en août 2020, le port de Beyrouth, des quartiers entiers de la ville et fait 214 morts et 6 500 blessés.
Le pays peine à s’en relever et la crise socio-économique se ressent en prison. La qualité et la quantité des repas distribués par l’administration pénitentiaires diminuent. L’inflation réduit les moyens des détenus qui se trouvent dans l’incapacité de se procurer des aliments. Les médicaments sont en rupture, les médecins sont rares en détention, les produits d’hygiène et les vêtements manquent. L’essence coûte trop cher. Les familles ne peuvent plus rendre visite à leur proche détenu. Les visites s’espacent, la distribution de produits de première nécessité également.
Des organisations de la société civile sont sollicitées pour toutes sortes de services, habituellement garantis par les autorités : aide juridique, formation du personnel, soutien psychologique ou médical. La pandémie de Covid-19 n’épargne pas non plus les prisonniers. Ses effets sur la vie quotidienne des détenus (activités, formations, interventions extérieures) sont toujours observés.
L’enchaînement des crises ne fait qu’aggraver un système carcéral déjà sous tension.