LES PRISONS CONGOLAISES comptent parmi les plus surpeuplées du monde : le taux d’occupation est de 313 % en 2020. Il atteint plus de 600 % dans les maisons d’arrêt de Brazzaville et de Pointe Noire. Cette situation serait principalement due au recours excessif à la détention provisoire, à la vétusté des prisons et au manque de moyens alloués à l’administration pénitentiaire.
Les commissariats de police sont des lieux de détention de facto. De nombreuses personnes peuvent y être placées pendant plusieurs mois en attendant leur procès. Ces lieux ne sont pas soumis à la législation pénitentiaire et ne sont pas contrôlés par les autorités pénitentiaires. Le nombre de personnes qui y sont détenues n’est pas connu. Des organisations de la société civile dénoncent de nombreux cas de détention arbitraire et de harcèlement de certaines catégories de la population. Des jeunes pauvres feraient l’objet d’arrestations arbitraires sous couvert de réponse au sentiment d’insécurité de la population, marquée par la violence urbaine et le phénomène dit des “bébés noirs”. Ce terme désignerait des groupes de jeunes, âgés de 13 à 30 ans, accusés de faits de violence.
Des cas de torture, violence et mauvais traitements à l’encontre des personnes détenues sont également signalés, particulièrement dans les commissariats. Aucun mécanisme de prévention de la torture n’existe au Congo. Les dispositifs en vigueur ne permettent pas aux personnes détenues de déposer plainte contre l’administration pénitentiaire.
Aucun établissement n’est réservé aux femmes détenues. Seuls des quartiers ou des cellules leur sont dédiés au sein des prisons pour hommes. Des organisations de la société civile signalent que les femmes sont souvent victimes d’abus sexuels de la part d’autres détenus ou du personnel. Les mineurs ne disposent pas non plus d’établissements dédiés. Les garçons et les filles sont parfois mélangés avec des adultes. Certaines associations disent rencontrer des difficultés pour aider les mineurs car l’administration pénitentiaire ne leur accorde pas les autorisations nécessaires pour entrer en prison.
La majorité des personnes détenues dorment à même le sol, sur des cartons ou des matelas en lambeaux. Les quelques couchages existants sont infectés de parasites et sont souvent source de tensions. Seules les personnes en mesure de payer peuvent accéder à des équipements de base tels qu’un lit et une moustiquaire. Des cellules dites “V.I.P.” sont présentes dans les maisons d’arrêt de Brazzaville et de Pointe Noire. Les personnes détenues y sont placées en fonction de leurs moyens financiers et de leur notoriété.
Le nombre de repas est réduit, en 2021, à un par jour dans les principales prisons du pays en raison de restrictions budgétaires. La plupart des personnes détenues dépendent de leurs familles pour accéder à la nourriture. Les personnes autochtones sont particulièrement mal nourries car leurs familles vivent généralement loin des centres urbains. L’accès à l’eau est irrégulier et précaire. Les personnes détenues dans les commissariats de police sont obligées de faire leurs besoins devant tout le monde dans un seau commun.
Le personnel de surveillance est insuffisant en nombre et très peu formé. L’administration fait appel à des corps militaires pour tenter de pallier le manque d’agents. Certaines responsabilités sont déléguées aux personnes détenues. Cela crée une hiérarchie parallèle informelle, des situations d’abus de pouvoir et entretient un phénomène de corruption endémique.
Très peu d’activités sont proposées. Le droit à l’éducation est, en pratique, peu respecté et le taux d’analphabétisme est élevé. Toutes les personnes condamnées sont tenues de travailler. L’offre de travail est quasi inexistante, tout comme celle des formations professionnelles.
Les visites familiales durent 15 minutes et se déroulent dans un lieu collectif surveillé. À Brazzaville, les organisations de la société civile rapportent que les proches sont obligés de payer les surveillants pour avoir accès au parloir. Cette maison d’arrêt ne dispose pas de téléphone pour les personnes détenues. Celles-ci ne peuvent appeler leurs proches qu’en cas d’urgence avec un téléphone dédié à l’administration.
Seuls les établissements de Brazzaville et de Pointe Noire disposent d’une unité de soins. Celles-ci manquent d’équipements, de médicaments, de personnel généraliste et spécialisé. Les soins de santé sont généralement à la charge des personnes détenues ou de leur famille. Les décès en détention sont nombreux. Les mesures visant à protéger la population carcérale des moustiques, vecteurs du paludisme, font également défaut.
Un nouveau code pénitentiaire entre en vigueur en avril 2022. Il se base sur les principaux textes internationaux en matière de détention. La mise en œuvre de ses dispositions constitue un défi majeur pour les années à venir.