Roumanie
Capitale — Bucarest
Population du pays
Taux d'incarcération (pour 100 000 habi…
Nature du régime
Indice de développement humain
i2016/ PNUDMinistère(s) en charge de l'administrat…
Nombre de personnes incarcérées
Durée moyenne de détention (en mois)
25mois
i2014/ SPACETaux d'occupation
Nombre d'établissements
i2016Un MNP est créé
Ouicréé en 2015
Femmes incarcérées
Mineurs incarcérés
Pourcentage de personnes en détention p…
La peine de mort est abolie
Ouidepuis 1989
Le quotidien
Les cellules et leurs équipements
La plupart des prisons sont surpeuplées et les conditions de vie sont problématiques. Les cellules sont pour la plupart collectives. Le minimum d’espace au sol de 4m² par personne pour les cellules collectives et de 6m² par personne pour les cellules individuelles n’est pas respecté.
La lumière artificielle prévaut la plupart du temps dans les cellules. L’aération et le chauffage sont insuffisants. Il en résulte des moisissures et une mauvaise hygiène. Les matelas, anciens et sales, sont signalés.
L’APADOR-CH visite les prisons de Târsgor en 2013 et de Targu Jiu en 2016. Les prisonniers y disposent de moins de 2m² d’espace au sol dans les cellules collectives. Ils peuvent y rester jusqu’à 22 heures et devoir partager un lit simple à deux. Deux personnes détenues à la prison d’Oradea occupent des cellules de 7m² chacune. Une décision de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) condamne, en avril 2016, la Roumanie à payer près de 100 000 euros d’indemnités compensatoires à 18 personnes détenues en raison de mauvaises conditions de détention.
La nourriture
La qualité de la nourriture est déficiente dans la plupart des prisons. Moins d’un euro en moyenne est aloué par jour et par personne. Cette qualité est critiquée en 2015 par le Comité européen pour la prévention de la torture (CPT). Le Comité rapporte la mauvaise qualité des produits fournis à Poarta Alba et un manque de fruits, de viande et de produits frais. Les repas, à la prison de Margineni, sont principalement constitués de pommes de terre, de carottes, de betteraves et d’oignons. Les prisonniers portent plaintes en conséquence dans plusieurs établissements.
L’APADOR-CH constate, au centre pour mineurs de Tirgu Mures, l’absence de réfectoire. Les jeunes détenus sont contraints de prendre leur repas dans leur cellule. La cuisine manque d’hygiène. Les murs de celle de la prison de Colibaşi sont humides et moisis et le système de ventilation ne marche pas1.
Les détenus peuvent solliciter des menus conformes aux préceptes de leur religion ou à un régime alimentaire particulier auquel ils sont astreints (notamment les diabétiques). Les détenus peuvent acheter de la nourriture au magasin de la prison. Les prix y sont très élevés. Le paquet de café Jacobs de 500 g coûte environ sept euros à Colibaşi. Les détenus peuvent recevoir, de leur famille, des colis alimentaires.
APADOR-CH, Rapport de visite de la prison de Colibaşi, 7 mars 2016 (à consulter en roumain) ↩
L'hygiène
La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) condamne régulièrement la Roumanie pour ses mauvaises conditions de détention.
Le plaignant de l’affaire Iacov Stanciu contre Roumanie (35972/05) critique les conditions de détention de la prison de Ploiesti, de celle de Margineni et des hôpitaux pénitentiaires de Jilava et Rahova. La CEDH confirme, dans son jugement rendu le 25 juillet 2012, cette situation et la décrit de la façon suivante : un nombre limité de toilettes et de lavabos pour un nombre élevé de prisonniers, des toilettes non approvisionnées en eau dans les cellules, absence d’eau chaude pour des lavabos utilisés pour une grande diversité de tâches (hygiène corporelle, lessive, nettoyage des objets personnels et des toilettes), un accès limité aux douches. Les juges dénoncent les mauvaises conditions sanitaires, la présence de rats, de cafards, de poux et de puces de lits, ainsi que le mauvais état des matelas et des draps.
Il est constaté, dans l’affaire Ali contre Roumanie n°2 (30595/09), que l’eau n’est pas potable dans certains établissement, notamment à Jilava.
La visite du Comité européen pour la prévention de la torture (CPT) dans les prisons d’Arad et de Târsgor révèle, en 2014, une plomberie en mauvais état, des dysfonctionnements des toilettes la présence de vermine. Les pommeaux de douche manquent à Arad et à Oradea. Peu de savon et de détergeant sont mis à disposition des prisonniers. La douche n’est garantie que deux fois par semaine à la prison pour femme de Târsgor. L’Administration pénitentiaire nationale (APN) indique, dans son enquête de 2015, que l’accès quotidien à l’eau chaude devrait être garanti dès la fin 2017 dans l’ensemble des établissements roumains.
Les draps sont distribués par l’administration mais les personnes détenues peuvent aussi en recevoir de leur famille.
La santé
Les soins de base sont gratuits pour les prisonniers.
Un médecin au moins et plusieurs infirmières sont présents dans chaque établissement, parfois un dentiste et un psychiatre. Un gynécologue est présent à la prison pour femmes de Târsgor. Les travailleurs médicaux sont en sous-effectif.
Le nombre de psychiatres est insuffisant. Des psychiatres externes peuvent être engagés pour répondre au besoin grandissant. C’est le cas au centre pour mineurs de Târgu Mures où 70 jeunes étaient diagnostiqués, en 2014, comme sujets à des problèmes mentaux lors de la visite de l’APADOR-CH.
Les prisonniers se plaignent que les soins dentaires se limitent à des extractions. Des dentistes peuvent être appelés pour dispenser des traitements dentaires spéciaux (notamment à la prison de Codlea). Les frais sont alors à la charge du patient détenu. La prison pour mineurs et jeunes adultes de Tichileti possède un cabinet dentaire équipé mais aucun dentiste n’y exerce, constate l’APADOR-CH lors de la visite en juillet 2013. Les prisonniers sont envoyés à l’établissement de Slobozia pour tout traitement dentaire. Slobozia est totalement rénové et possède une pharmacie fournie. L’aile médicale inclut trois pièces de mise en quarantaine contenant quatre lits chacune, une pièce pour les échantillons de salives destinés à diagnostiquer la tuberculose, une chambre pour les patients atteint de tuberculose (inoccupée au moment de la visite), un cabinet dentaire, une pièce pour les médecins et une pour les infirmières.
L’aile médicale de la prison de Botosani est constituée cinq pièces pour 24 places dans l’infirmerie et accueilledix infirmières, constate l’APADOR-CH lors de sa visite en 2014.
Les activités
Les prisonniers peuvent participer à des activités pédagogiques mais la plupart ne le font pas. Des lieux de culte orthodoxes et des enseignements sont proposés dans toutes les prisons.
Des ateliers de peinture, des activités manuelles, un groupe de musique, un studio de TV interne, une bibliothèque, une salle et des terrains de sport sont à disposition dans la prison de Botosani, rapporte l’APADOR-CH en décembre 2014. Des prisonniers y cultivent des légumes.
L’Administration pénitentiaire nationale (APN) mentionne, en 2015, des programmes pédagogiques tels que Les poèmes de prison, le Festival de Théâtre pour les détenus (neuvième édition) et le Programme éducatif de la deuxième chance. Ces propositions sont assurées par l’administration ou par des organisations religieuses ou des associations. Il est aussi proposé des cours d’éducation civique, des programmes de thérapie psychologique et des activités visant à promouvoir les liens avec les familles.
L’APADOR-CH constate l’absence de vrai système de réhabilitation dans les prisons roumaines, les ateliers étant soit complets, soit mal équipés.
Le travail
Le pourcentage de prisonniers impliqués dans une activité rémunérée augmente de 2014 à 2015, passant de 27% à 29% selon l’enquête de l’Administration pénitentiaire nationale (APN). 8 462 personnes détenues sont sélectionnées et assignées à une tâche de maintenance de la prison ou à un autre travail. Parmi elles, 3 255 personnes exercent un travail générateur de profits, basé sur un contrat de service.
Les prisonniers de la prison de Târgu Jiu sont payés en moyenne 95 lei (21 euros) par service1. Ils sont assignés à la fabrication de matelas, de literie pour la prison ou font des travaux de menuiserie. Ils travaillent aussi pour diverses entreprises comme la fabrication de chaussures ou des travaux de construction, etc. Les produits fabriqués dans ces ateliers sont exclusivement réservés à un usage interne.
APADOR-CH, Rapport de visite de la prison de Târgu Jiu, 16 février 2016 (à consulter en roumain) ↩
Détenus travaillant
29 %
La scolarité et la formation professionnelle
2 459 personnes détenues sont inscrites, pour la période 2015-2016, à des cours de préparation l’entrée à l’école secondaire ou à l’université selon l’enquête de l’Administration pénitentiaire nationale (APN). Les élèves représentent environ 10% de la population carcérale totale. Un tiers des prisonniers scolarisés participe au programme de la deuxième chance, un programme dédié aux personnes trop âgées pour être scolarisées dans le secondaire. Le pourcentage de mineurs qui assiste aux cours de préparation est de 64% (201 sur les 316 détenus). Il est en légère baisse par rapport aux années précédentes mais cette baisse est attribuée à des peines de prisons plus courtes.
Vice publie, en septembre 2015, un article sur l’enseignement scolaire dans la prison pour mineurs et jeunes adultes de Craiova. Les cours durent 45 minutes et sont limités à 12 élèves. Chaque élève dispose d’un cahier et d’un manuel de langue. Un stylo lui est fournit, repris à chaque fin de classe. Le programme permet aux élèves de poursuivre leur formation après leur libération en leur assurant une place dans un programme de la seconde chance ou dans des cours du soir. Pour les jeunes détenus, aller en cours est un moyen d’échapper à l’enfermement et la plupart apprécie ce moment. Pour autant, 40% des jeunes détenus récidivent et retournent en prison.
Les médias
Les prisonniers ont accès à plusieurs média (presse, radio, télévision, Internet sous conditions). L’usage des écouteurs est prohibé et beaucoup se plaignent du bruit.
La religion
La liberté religieuse est garantie par l’article 58 de la loi 254/2013. La religion orthodoxe est majoritaire. L’administration en rémunère trente prêtres. Dix-huit religions bénéficient d’une autorisation de pratique et notamment le catholicisme rom, le protestantisme, l’islam, le judaïsme et les Témoins de Jehova.
Les intervenants extérieurs
Les intervenants extérieurs ne sont autorisés à pénétrer dans les prisons que dans le cadre d’une activité. Ce sont pour, la plupart, des membres d’associations religieuses.
Les ressources financières et l'indigence
Les ressources financières des prisonniers proviennent de leurs proches et du travail. L’argent peut être adressé via un compte bancaire placé sous la tutelle de l’administration.
Les personnes détenues ne disposent gratuitement que des soins médicaux de base (les médicaments sont payants), de la nourriture distribuée lors des repas (rarement suffisante) et de certaines activités de réhabilitation.
Un ou deux magasins sont accessibles dans chaque prison. Les prix des biens proposés, élevés, ne sont pas conformes à ceux du marché.
L'expression des détenus
Les requêtes individuelles et les plaintes sont adressées au chef d’établissement ou au directeur général de l’Administration pénitentiaire nationale (ANP) ou encore au ministre de la Justice. Les prisonniers peuvent aussi les adresser directement au président de la République.
Les plaintes sont suivies par le juge pour les droits des personnes détenues et garanties par la loi (la loi 254/2013 sur l’application des peines). Le juge, basé dans la prison, a accès à toutes les informations nécessaires. Il peut enquêter et questionner les différents acteurs impliqués. Sa décision fait loi mais le prisonnier ou l’administration peuvent, tous deux, faire appel. L’efficacité du processus peut être remise en cause, au vu du surpeuplement des prisons.
Le juge de la prison de Botosani reçoit en moyenne une vingtaine de plaintes par semaine1. La plupart d’entre elles concerne les conditions de détention.
Les prisonniers sanctionnés disciplinairement peuvent déposer un recours devant le juge qui supervise les sanctions, trois jours après le prononcé. La sanction est suspendue et l’affaire renvoyée devant le tribunal de première instance.
APADOR-CH, Rapport de visite de la prison de Botosani, 27 janvier 2015 (à consulter en roumain) ↩
Les mouvements collectifs
Les prisonniers du quartier de haute sécurité de la prison de Craiova protestent, le 20 décembre 2015, contre l’arrêt des programmes télévisés à 23 heures chaque soir. Ils détruisent des meubles, brûlent des matelas et brisent des vitres1.
L’Administration pénitentiaire nationale (APN) enregistre en 2015 :
-
Quatre tentatives d’évasion : deux mineurs à la Prison de Codlea, deux prisonniers à l’hôpital pénitentiaire de Dej, un prisonnier à la prison de Maegineri et un à la prison de Poarta Alba
-
Deux évasions : un prisonnier à la prison de Bacau, un prisonnier à la prison de Galati
-
Cinq non réintégration après travail à l’extérieur : aux prisons de Colibaşi, Aiud, Barcea Mare, Pelandava et Focsani (un prisonnier dans chaque cas)
Révolte à la Craiova, 23 décembre 2015 (à consulter en roumain) ↩
La sécurité
Voir Mauvais traitements et violences et Les personnels
L’Administration pénitentiaire nationale (APN) rapporte, en 2015, dans son enquête que les sanctions disciplinaires peuvent consister à suspendre le droit de cantiner pendant deux mois (à l’exception des produits d’hygiène de base), à suspendre les visites pendant trois mois, à émettre un avertissement, à une mise à l’isolement pendant dix jours, à suspendre le droit d’assister aux activités culturelles, artistiques, et sportives pendant un mois et/ou à suspendre le droit de travailler pendant un mois.
Le Comité européen pour la prévention de la torture (CPT) souligne, en 2014, lors de sa dernière visite en Roumanie que les sanctions disciplinaires ne sont pas toujours proportionnelles aux actes commis. La mise à l’isolement peut être considérée comme abusive. Une personne détenue à la prison d’Oradea est isolée en 2014 durant 26 jours, alors même que la durée maximale légale est de dix jours.
Des prisonniers de Codlea se plaignent des contrôles effectués la nuit par les unités d’intervention à la recherche d’objets interdits.1 Ces inspections ne sont pas filmées. Les détenus se plaignent également du manque d’intimité dans leur cellule. Certains détenus accrochent des serviettes ou des draps autour de leur lit pour faire office de rideaux. Cette pratique est interdite et sanctionnée.
APADOR-CH, Rapport de visite de la prison de Codlea, 4 mars 2016 (à consulter en roumain) ↩