Santé

Ministère de tutelle

ministère de l’Intérieur

Le ministère de l’Intérieur désigne les médecins chargés des soins en prison après avis du ministère de la Santé (article 52 du décret no 14310).1

Nombre de personnels de santé (ETP)

-

Des organisations de la société civile alertent sur le manque de personnels de santé en détention. Elles signalent des problèmes liés au paiement des salaires des médecins. De nombreux personnels de santé “fuient” le pays notamment en raison de la situation socio-économique.

Le Comité des Nations unies contre la torture constate, en 2016, que la situation des services médicaux dans les prisons et lieux de détention libanais ne respecte pas les dispositions du règlement pénitentiaire. Les personnes détenues souffrent du manque de médecins généralistes, de spécialistes (psychologues, psychiatres, dentistes) et de médicaments. La fréquence des visites médicales est insuffisante et les services médicaux ne répondent pas à l’ensemble des besoins des détenus.

Le Comité indique que l’équipe responsable de la prise en charge médicale est composée d’un :

  • médecin, présent en détention trois fois par semaine et chargé de soigner à la fois les détenus et les membres des Forces de sécurité intérieure (FSI) ;
  • chirurgien, une fois par semaine ;
  • oto-rhino-laryngologiste, une fois par semaine ;
  • dentiste, une fois par semaine, qui assure uniquement le service “d’arrachage de dents”.

Le Comité déplore le manque de médecins spécialistes. Les procédures pour accéder à des consultations sont lentes, même en cas d’urgence médicale. Les consultations avec des psychiatres ne sont pas organisées de manière régulière. Des organisations de la société civile essaient de compenser ce manque. Les services médicaux seraient mieux assurés dans les prisons sous l’autorité du ministère de la Défense. Les détenus bénéficieraient d’un examen médical à leur entrée en prison et de la visite d’un psychiatre deux fois par semaine si besoin. Un dermatologue serait présent tous les jours de la semaine. Les médicaments et le traitement nécessaires seraient administrés en cas d’urgence.1

L’accès aux soins est gratuit

oui

La loi garantit le droit de bénéficier de prestation de soins, y compris dentaires.1


  1. Ensemble contre la peine de mort, Carole Berrih et Karim El Mufti, “Vivants sans l’être : mission d’enquête, Liban“, 2020, p. 91. 

  • Le Comité pour la prévention de la torture libanais (CPT) visite, le 31 mars 2021, la prison de Roumieh. Il remarque que certains prisonniers sont obligés de payer leurs propres frais médicaux, notamment ceux qui doivent être opérés.

    i
    04/05/2022
    / National Human Right Commission including the Committee for the Prevention of Torture (NHRC-CPT) / Lebanon’s National CPT – Report to the UNSPT, p. 12

Un examen médical est pratiqué à l’entrée en détention

oui

Les examens médicaux se déroulent en toute confidentialité

non

La confidentialité des examens médicaux n’est pas toujours respectée.

Le Comité des Nations unies contre la torture constate, en 2016, le manque important de médicaments : antalgiques, traitements des maladies urologiques, traitements de l’excès de cholestérol, etc. Le Comité signale également les carences concernant les fournitures médicales, telle que la gaze stérile. Il souligne la dépendance des autorités envers les organisations de la société civile pour combler ces carences.1
La crise socio-économique qui traverse le Liban depuis 2019 provoque une pénurie de médicaments dans tout le pays, y compris en prison. La pharmacie de la prison de Roumieh est presque vide. L’établissement ne dispose que rarement de produits de premiers secours.

Des observateurs signalent que les personnes détenues sont transférées à l’hôpital en cas d’urgence. Le coût du transfert serait, depuis le début de la crise économique, assuré par les proches des personnes détenues.
L’hospitalisation d’une personne détenue après 17 heures, horaire de fermeture des cellules, est soumise à l’autorisation du Procureur. La prise en charge des cas urgents pendant la nuit dépend de cette autorisation et “de la bonne volonté du personnel pénitentiaire, de son professionnalisme et de ses compétences à évaluer l’urgence de la situation”.1


  1. Centre libanais des droits humains, “Prisons du Liban : préoccupations humanitaires et légales”, 2010, p. 30. 

Le dépistage du VIH à l’arrivée en détention est souvent obligatoire. Ses modalités ne respectent pas l’ensemble des recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Celle-ci recommande le dépistage systématique des personnes détenues avec leur consentement éclairé et la mise à disposition des résultats. Une étude de 2012 révèle qu’au Liban la disponibilité des tests de dépistage et la communication des résultats par le médecin de la prison sont plutôt effectives. La confidentialité n’est, en revanche, pas respectée. Peu d’informations sur le VIH/SIDA sont transmises aux détenus. Aucun soutien psychologique ne leur est proposé. L’isolement et la stigmatisation accrue, combinés à l’emprisonnement, ont un impact négatif sur le bien-être psychologique et social des personnes touchées par le VIH/SIDA. Celles-ci voient leur liberté de mouvement et de communication avec les autres détenus, leur famille et leurs amis limitée.1 Elles sont placées, à Roumieh, dans le bâtiment dédié aux personnes ayant des troubles psychiques, surnommé “bâtiment bleu”. Les autorités prennent en charge le traitement du VIH/SIDA des détenus libanais. Les personnes détenues étrangères, non couvertes par le système de santé libanais, ne bénéficieraient pas de cette prise en charge. Elles dépendraient de l’aide d’organisations tierces (agences des Nations unies, Comité international de la Croix-Rouge) pour accéder à un traitement.


  1. SAHARA-J: Journal of Social Aspects of HIV/AIDS, HIV/AIDS prisoners: a case study on quality of life in Roumieh, Lebanon”, 2012, pp. 3-8. 

Une étude de 2012 signale que les personnes détenues séropositives sont soumises à des mesures de prévention discriminatoires. Elles sont isolées des autres détenus et ont un accès séparé aux parties communes (salle de bain, cuisine, cellules). Elles ne bénéficient pas d’activités. Leur consentement n’est pas pris en compte pour la mise en place de ces mesures.1


  1. SAHARA-J: Journal of Social Aspects of HIV/AIDS, “HIV/AIDS prisoners: a case study on quality of life in Roumieh, Lebanon”, 2012, pp. 4-8. 

  • Les personnes détenues du quartier B de la prison de Roumieh signalent au CPT, en mars 2021, une épidémie de gale. Elles affirment que cette épidémie est due à la présence de rats dans les réservoirs d’eau.

    i
    04/05/2022
    / National Human Right Commission including the Committee for the Prevention of Torture (NHRC-CPT) / Lebanon’s National CPT – Report to the UNSPT, p. 12
  • Une épidémie de gale touche, début janvier, la prison de Roumieh. Elle fait suite à une première vague survenue en août 2021. Le député George Okais dénonce la situation. Il explique : ”les événements actuels à Roumieh sont une véritable honte. C’est un massacre”. Le président de l’Ordre national des médecins annonce, quelques jours plus tard, que 90 % des cas de gale ont été traités. Quatre médecins seraient présents au sein de l’établissement quatre heures par jour.

    i
    04/01/2022
    / TRT World

Une ONG a mené, entre juin 2011 et février 2012, une campagne de sensibilisation à la réduction des risques auprès des détenus, en collaboration notamment avec le Programme national de lutte contre le sida (NAP), les FSI, l’Office des Nations unies contre les drogues et le crime (ONUDC). La campagne concernait la prévention et le diagnostic précoce du VIH, de l’hépatite B et de l’hépatite C, ainsi que le diagnostic et le traitement d’autres infections sexuellement transmissibles. L’initiative comprenait également l’organisation d’une formation de deux jours à l’intention de 35 membres du personnel des FSI (directeurs de prison, directeurs médicaux, surveillants).1


  1. Ministère de la Santé publique libanais, “National Report on Drug Situation in Lebanon”, 2017, p. 38. 

Seule la prison de Roumieh dispose d’une unité dédiée aux personnes souffrant de troubles pyschiques, surnommée “bâtiment bleu”. Cette unité est mise en place en 2002 à l’initiative d’une famille d’un détenu atteint de troubles psychiques.1 Le bâtiment bleu est considéré plus moderne que les autres locaux de l’établissement. Les conditions d’hygiène y sont moins défavorables et les portes restent ouvertes. Les personnes détenues porteuses du VIH/SIDA y sont également placées.
Un médecin rend visite aux personnes détenues dans ce bâtiment une fois tous les deux mois. Le juge est tenu d’envoyer un psychiatre tous les ans pour évaluer l’état de santé des détenus et pour “estimer leur guérison”. Le bâtiment est jugé insuffisamment équipé et inadapté à la prise en charge des détenus souffrant de maladies psychiques.2 Il est rénové en 2016 grâce aux dons d’une coopérative italienne et de l’ONUDC.
Les personnes détenues, dont les troubles psychiques n’ont pas été reconnus par le juge, ne font pas l’objet d’un placement spécifique.
Dany Khalaf, psychiatre à l’Association Justice et Miséricorde (AJEM), résume, en 2016, la situation : “Je suis le seul psychiatre ici à Roumieh où, sur 3 500 prisonniers, 300 souffrent de troubles psychologiques. Chaque semaine, je visite une unité différente de la prison. Roumieh n’est pas le pire des cas. Dans les autres prisons du pays, il n’y a pas de service psychiatrique spécial […] Actuellement, un juge est censé nommer un psychiatre qui rendrait visite aux prisonniers une fois par an afin d’évaluer si ‘ils ont déjà guéri’. Mais les maladies mentales ne se guérissent pas. En revanche, [elles peuvent être stabilisées] par des médicaments. Malheureusement, certains juges refusent de nommer un spécialiste et ont des opinions rétrogrades sur les maladies mentales”.

Les juges sont tenus de demander aux personnes arrêtées pour consommation de produits stupéfiants de faire un choix entre suivre un traitement et être incarcérées (loi n°673 de 1998). Les personnes qui choisissent le traitement sont suivies par un comité dédié à la toxicomanie (Drug Addiction Committee, DAC), sous l’autorité du ministère de la Justice.1


  1. Ministère de la santé publique libanais, “National Report on Drug Situation in Lebanon”, 2017, p. 39.