Le préfet propose le transfert de la personne détenue en établissement dédié, qui est soumis à l’accord de l’équipe médicale concernée. C’est généralement le cas lorsque la prison n’est plus en mesure d’assurer les soins nécessaires. La personne peut être placée en Unité hospitalière spécialement aménagée (UHSA), en Unité pour malades difficiles (UMD) ou en Unité de soins intensifs psychiatriques (USIP). La personne détenue peut demander elle-même à être transférée en UHSA, à l’inverse des autres unités.
Le transfert. Les délais d’attente sont généralement longs pour tous les établissements. Les urgences restent ainsi majoritairement prises en charge par les services généraux des hôpitaux psychiatriques. La construction des UHSA n’est pas parvenue à répondre aux situations de crise. Pour un transfert en UMD, l’attente est en moyenne de six mois. En 2018, les UMD comptent parmi les personne accueillies 7 % de patients-détenus.
La durée de placement. Ces établissements ne sont pas des lieux de soins de longue durée. Les personnes détenues sont renvoyées en prison, généralement au bout de quelques mois. Elles restent de un à trois mois en UHSA, six mois en UMD, deux à trois mois en USIP. Plus de 38 % ne fixent, en réalité, aucune limite.
Le réexamen de la mesure. Les patients-détenus disposent des mêmes droits de recours que les autres patients. Ils peuvent saisir le JLD à tout moment pour contester le bien-fondé́ de la mesure d’hospitalisation sans consentement dont ils font l’objet. Le juge est également chargé de contrôler la nécessité des mesures d’isolement et de contention.
La Commission de suivi médical (CSM) de chaque UMD statue sur le besoin de maintien ou non de la personne en UMD. Elle est tenue de réévaluer son état psychique au plus tous les six mois. Elle contrôle particulièrement les conditions de prise en charge en visitant au moins une fois par semestre l’UMD dont elle est responsable. Elle adresse ensuite un rapport à la Commission départementale des soins psychiatriques (CDSP) et au préfet.
Les unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA)¶
Les UHSA sont des structures hospitalières implantées dans des établissements de santé. Leur fonctionnement est assuré conjointement par le ministère de la Santé et celui de la Justice. L’administration pénitentiaire fournit le personnel chargé de la sécurité extérieure.
Ces unités accueillent, à la demande du médecin de la prison, les personnes détenues avec ou sans leur consentement en hospitalisation complète. Il en existe neuf pour un total de 440 places. La ministre de la Santé annonce, en 2018, la construction de huit nouvelles UHSA, pour 265 places.
Le déploiement des UHSA visait à juguler les situations d’urgence ayant cours en détention. Ces unités ne parviennent pas à répondre, dans les faits, aux situations de crise. La CGLPL note que l’UHSA de Marseille “ne prend pas de patients en urgence et ses délais moyens d’admission en 2019 sont trop longs pour permettre la prise en charge au moment opportun. En l’absence de place à l’UHSA, les urgences psychiatriques sous contrainte font très majoritairement l’objet d’une hospitalisation en psychiatrie“. La durée d’attente avant d’intégrer une UHSA varie d’un territoire à un autre. Dans le Nord, le délai moyen d’attente est, en 2019, de neuf jours. À l’UHSA de Condé sur Sarthe, il est compris, en 2019, entre 35 et 39 jours. La CGLPL décrit : “Les patients en situation de crise psychiatrique ont ainsi été laissés plus d’un mois dans leur cellule de manière inappropriée, sans suivi psychiatrique“.
Le quotidien¶
L’administration pénitentiaire contrôle, à l’UHSA, les entrées et les sorties. Elle est en charge des parloirs et des fouilles. Les conditions de vie dépendent des UHSA. Les patients peuvent, dans certains, circuler librement durant la journée. C’est notamment le cas à Marseille et Toulouse.
Les conditions de vie se rapprochent, dans d’autres, du régime hospitalier. Les personnes vivent dans des chambres et seul le personnel médical circule au sein des locaux. Les chambres de l’UHSA du Vinatier sont jugées spacieuses et lumineuses. Les salles de bain sont individuelles et les patients peuvent décorer les murs. Les personnes ne sont pas autorisées à fumer. Les agents pénitentiaires peuvent être appelés en cas d’urgence par les personnels médicaux.
Organisation des soins¶
Des thérapies et des traitements médicamenteux sont prescrits par les psychiatres. Les activités sont peu nombreuses en dehors des temps de soins, ce qui rend généralement les patients-détenus inactifs. Les soins prodigués ”ne semblent [pas] la hauteur des enjeux d’une population qui cumule les fragilités médicales, mais aussi sociales, et qui a vocation à sortir du milieu carcéral”. L’équipe de soins varie considérablement d’un établissement à l’autre. En moyenne, entre deux et cinq psychiatres sont présents à temps plein. Un seul établissement dispose, en 2017, d’un médecin généraliste à temps plein. Des infirmiers et des psychologues sont également présents. Certains établissements accueillent des psychomotriciens, des éducateurs sportifs, des ergothérapeutes ou encore des kinésithérapeutes. Un assistant social assure un ”suivi social éducatif et judiciaire”.
Formation¶
Personnel de santé. Le personnel de santé dispose d’une formation spécifique en soins psychiatriques. Certains reçoivent des éléments de formation en droit pénitentiaire.
Personnel de surveillance. Les agents de surveillance des UHSA ne reçoivent pas de formation spécifique à la prise en charge des personnes qui souffrent de troubles psychiques.
Continuité des soins ¶
Le dispositif de coordination des soins est considéré comme ”insuffisant” lorsque la personne quitte l’UHSA pour retourner en établissement pénitentiaire. Les équipes médicales de l’unité fournissent rarement des informations claires et précises quant aux besoins de soins de la personne. Le SPIP est absent des UHSA.
Les unités pour malades difficiles (UMD)¶
Ces unités, présentes au sein de 10 hôpitaux psychiatriques, accueillent des personnes détenues qui présentent un danger pour elles-mêmes ou pour autrui. Leur état de santé requiert la mise en œuvre, sur proposition médicale et dans un but thérapeutique, de protocoles de soins intensifs et de mesures de sécurité particulières.
Les personnes déclarées pénalement irresponsables peuvent également y être placées. L’admission se fait, sous la forme d’une hospitalisation complète, sans le consentement des personnes. Les UMD disposent actuellement d’environ 530 places. Elles sont sollicitées au-delà de leur capacité : les demandes d’admissions augmentent alors que le nombre de sorties est faible.
Le quotidien¶
Les conditions de vie en UMD sont similaires à celles des hôpitaux psychiatriques généraux. Aucun personnel pénitentiaire ou de surveillance n’est présent, mais l’équipe médicale est particulièrement renforcée. Les activités proposées sont généralement plus nombreuses et les traitements mieux dosés et évalués. Toutefois, le CPT observe que les patients de l’UMD de Cadillac restent généralement allongés sur des fauteuils dans les salles communes, sans aucune stimulation de la part des équipes soignantes.
Organisation des soins¶
Un projet de soins personnalisé est assuré pour chaque patient. Il prévoit des traitements médicamenteux et de la psychothérapie. Le CPT rapporte, en 2019, la prescription excessive de psychotropes à certains patients. Il note cependant la mise en place de programmes d’éducation thérapeutique destinés aux patients souffrant de schizophrénie. L’objectif est de les aider à reconnaitre les situations à risque et les signes prémonitoires de la crise. L’équipe médicale est pluridisciplinaire : au minimum quatre psychiatres, deux médecins généralistes et deux internes sont systématiquement présents. Ils sont aidés par une quarantaine d’infirmiers et d’aides-soignants.
Formation¶
Personnel de santé. Le personnel de santé dispose généralement d’une formation en soins psychiatriques. Certains ont suivi une formation en droit pénitentiaire.
Personnel de surveillance. Il n’y a pas de personnel pénitentiaire chargé de la surveillance en UMD.
Les unités de soins intensifs psychiatriques (USIP)¶
Les USIP sont des unités fermées avec des conditions de sécurité renforcées au sein d’un établissement médical. Elles peuvent accueillir des personnes détenues présentant des troubles majeurs du comportement et qui ne peuvent être prises en charge dans des conditions satisfaisantes dans les services de psychiatrie générale.
Ces unités placées au sein d’hôpitaux psychiatriques accueillent, parfois en urgence, des personnes qui présentent un danger pour elles-mêmes ou autrui. Leur état de santé requiert la mise en œuvre, sur proposition médicale et dans un but thérapeutique, de protocoles de soins intensifs et de mesures de sécurité particulières.
Le quotidien¶
Les USIP sont des services fermés qui disposent d’une quinzaine de lits. Le CPT note, en 2019, les efforts de décoration mais prévient du caractère austère de certaines unités.
Dans tous les établissements, les mesures d’isolement et de contention sont tenues d’être autorisées par le psychiatre. Elles doivent être utilisées en dernier recours, en cas de danger grave pour la santé du patient ou d’autrui.
Organisation des soins¶
L’offre de soins varie en fonction des USIP. Les activités telles que l’ergothérapie ou la psychomotricité sont rares. Une équipe pluridisciplinaire assure les soins. La présence de soignants est renforcée : un infirmier est en moyenne présent pour quatre malades. Le CPT relève, en 2019, que des prescriptions dites “si besoin” (des prescriptions médicamenteuses conditionnelles, Pro Re Nata , “PRN“, qui peuvent être ajoutées aux ordonnances continues, ndlr.) de tranquillisants puissants concernent 90 % des patients de l’USIP de Cadillac. Le CPT estime un tel recours “excessif”.
Formation¶
Personnel de santé. Le personnel de santé dispose d’une formation spécifique en soins psychiatriques. Certains disposent d’une formation en droit pénitentiaire.
Personnel de surveillance. Il n’y a pas de personnel pénitentiaire chargé de la surveillance en en USIP.