Sécurité, ordre et discipline

Les fonctions de sécurité sont dévolues à

  • l’administration pénitentiaire
  • la police ou la gendarmerie
  • des société privées

Le département de sécurité du ministère de l’Intérieur est chargé de la gestion de la sécurité des prisons.
Le ministère de l’Intérieur confie la sécurité extérieure aux établissements à des entreprises privées. L’article 63 du règlement pénitentiaire précise pourtant que “la sécurité extérieure des établissements revient aux forces et corps de sécurité de l’État (FFCCSE) ou, le cas échéant, aux organes de police des communautés autonomes”.

Le parc pénitentiaire dispose d’établissements, de quartiers ou de cellules dotés de dispositifs sécuritaires renforcés

oui

Des quartiers d’isolement, également appelés de haute sécurité, hébergent les détenus considérés dangereux.
La prison Herrera de La Mancha est, en 1979, l’un des premiers établissements à sécurité maximale construit en Espagne. La prison d’Alicante II est l’un des plus sécurisés.
Parmi les mesures de sécurité renforcées se trouvent :

  • l’encellulement individuel
  • le temps de promenade en solitaire
  • des contacts réduits avec les surveillants
  • des changements fréquents de cellule

L’assignation à ce type de régime ne fait l’objet d’aucune limitation dans le temps.

Les personnes détenues sont classées selon leur niveau supposé de dangerosité

oui

L’article 63 de la loi organique pénitentiaire prévoit une individualisation du traitement selon le niveau présumé de dangerosité du détenu. La classification prend en compte les faits reprochés, sa personnalité, sa situation familiale, sociale et la durée de la peine prononcée.

La classification des détenus est révisée

tous les trois ou six mois

La classification est révisée tous les trois ou six mois pour les détenus classés premier grade (article 65 de la loi organique pénitentiaire).

Les dispositifs de fouilles en usage sont les fouilles par palpation, les fouilles intégrales et les fouilles intimes. Le personnel effectuant les fouilles est clairement identifiable. Les cellules ne sont pas équipées de caméras. Les fouilles ne sont pas filmées. Les fouilles à nu sont réalisées dans une pièce prévue à cet effet. Les détenus soupçonnés de trafic ou de consommation de drogue sont régulièrement soumis à des fouilles à nu.

L’examen des cavités corporelles est effectué par un médecin

non

Les fouilles intimes sont obligatoirement réalisées par des fonctionnaires de même sexe que la personne détenue. Elles sont pratiquées dans un lieu clos, sans la présence de codétenus, et, autant que possible, dans le respect de la personne (article 68 du décret royal 190/1996).

Les proches sont soumis, à leur entrée en prison, à un contrôle par

  • appareil électronique
  • fouilles par palpation et intégrale

Les visiteurs sont tenus de passer sous un portique électronique. L’article 45 du décret 190/1996 autorise la fouille à nu d’un visiteur en cas de suspicion de dissimulation d’un objet illicite. Le visiteur est interdit d’accès en cas de refus de s’y soumettre.

Les professionnels sont soumis, à leur entrée en prison, à un contrôle par

appareil électronique

Surveillants, travailleurs sociaux, avocats, aumôniers et autres personnes accréditées sont soumis à un contrôle électronique.

Des moyens de contraintes (menottes, entraves…) sont utilisés, après un incident, pour transférer un détenu vers le quartier de haute sécurité.
Le CPT rapporte que la contention mécanique est utilisée pour des périodes prolongées, sans contrôle adéquat. Elle est utilisée à des fins punitives lorsque la personne détenue présente une agressivité verbale ou qu’elle fait acte de “résistance passive”. Le CPT prévient d’un risque de traitements inhumains et dégradants, particulièrement lorsque la contention est utilisée sur des détenus souffrant de troubles psychiques.1

Le CPT constate que la contention mécanique est utilisée 186 fois dans les établissements pénitentiaires de Catalogne pendant les neuf premiers mois de l’année 2018. Le personnel soignant ne réalisait que des contrôles visuels à intervalles réguliers. Le Comité recommande une surveillance constante par un personnel qualifié lorsqu’une telle mesure est mise en place.2
Le Défenseur du peuple rapporte qu’une personne souffrant de graves troubles mentaux détenue au centre pénitentiaire de Soria en Catalogne a été placée sous contention mécanique pendant une très longue période. Aucun contrôle médical n’a été réalisé durant la mesure.3

Des mineurs détenus dans les établissements de Sogradio et Tierras de Oria font état de gifles et coups infligés par le personnel. Le CPT signale l’usage de la contention mécanique sur des mineurs agités. Certains mineurs du centre de Tierras de Orias sont immobilisés sur le ventre, attachés à un lit pendant plusieurs heures. Ils sont privés d’accéder aux toilettes.


  1. Comité européen de prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT), Rapport au gouvernement espagnol relatif à la visite effectuée du 27 septembre au 10 octobre 2016, novembre 2017, p. 39. (en anglais) 

  2. Comité européen de prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT), Rapport au gouvernement espagnol relatif à la visite effectuée du 6 au 13 septembre 2018, février 2020, p. 41. (en anglais) 

  3. Défenseur du peuple, Rapport annuel 2018, 2019, p. 100. (en espagnol) 

  • Le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) souligne le “progrès considérable” observé quant à la réduction du recours à la contention mécanique et de la durée de son application. Le CPT rappelle, cependant, que l’objectif doit être l’abolition de cette mesure en détention.

    i
    2022
    / El salto Diario

Le personnel de surveillance dispose

d’armes à feu

Le personnel est autorisé à recourir à des armes à feu en cas de danger imminent pour les personnes ou pour l’établissement.

Un corps d'intervention spécialisé est constitué pour le maintien de l’ordre

oui

L’article 72 du règlement pénitentiaire établit qu’en cas de graves désordres et de danger imminent pour les personnes ou pour les biens, le directeur de l’établissement peut solliciter l’intervention des forces de l’ordre (Fuerzas de Seguridad de guardia). Celles-ci peuvent faire usage d’armes à feu. L’utilisation de ces armes est réglementé par la législation sur les FFCCSE et par la loi organique générale pénitentiaire.

L’Observatoire du système pénal et des droits humains fait état d’abus de surveillants qui perdurent, tels la dégradation d’effets personnels de détenus.

L’Espagne met en place depuis quelques années un programme de prévention de la radicalisation.
Le personnel pénitentiaire est tenu d’observer de près les pratiques religieuses des détenus radicalisés (“internos radicalizados”, IR) : leur alimentation, leurs lectures, leur rigueur dans la pratique les rites (jeûne, prière…), leur tenue vestimentaire et leur consommation de tabac… L’administration distribue aux chefs d’établissements, en 2018, un nouvel “Instrument d’évaluation du risque de radicalisation violente”. Des psychologues pénitentiaires complètent ce document. Ils sont tenus d’évaluer les personnes condamnées pour ces faits ou en montrant les signes. Ces évaluations sont renouvelées tous les six mois.
Le ministère de l’Intérieur déploie, depuis décembre 2020, des “opérations anti-djihadistes“ dans les prisons. Ces opérations sont réalisées grâce aux informations obtenues dans le cadre des “groupes de contrôle et de surveillance” créés en 2008. Ils sont composés d’agents pénitentiaires, chargés de collecter des informations sur les détenus jugés suspects. Un protocole divise les détenus considérés comme radicalisés en trois groupes : les personnes condamnées pour terrorisme, les détenus dits radicalisés après leur entrée en prison et les détenus considérés comme “vulnérables” au prosélytisme.
L’administration pénitentiaire recense, en 2021, 223 prisonniers considérés comme radicalisés. Ils sont séparés des autres détenus et répartis dans les prisons du pays.

Nombre d’évasions

13

i
2017
/ SPACE
  • Un détenu s’évade dans la nuit du 22 septembre de l’hôpital Aquilino Tejeira de Penonomé où il était hospitalisé.

    i
    23/09/2022
    / El siglo

Les infractions à la discipline sont définies par les textes

oui

La discipline est encadrée par la loi organique générale pénitentiaire de 1979 et par le règlement pénitentiaire, promulgué en 1981 et modifié en 1996.

L’article 42 de la loi pénitentiaire de 1979 prévoit différentes sanctions disciplinaires :

  • le placement à l’isolement cellulaire, pour 14 jours au plus
  • le placement à l’isolement le week-end, pas au-delà de sept
  • la privation de permis de sortie, pour deux mois au plus
  • la limitation des communications téléphoniques, pour un mois au plus
  • la privation de promenades et d’activités communes, pour un mois au plus.
  • l’avertissement

Les infractions à la discipline font l’objet d’une enquête

dans la plupart des cas

Le dossier d’instruction doit comporter le numéro d’identification de l’instructeur et le poste qu’il occupe. Les noms de ces chargés d’enquête sont parfois dissimulés.

Le prononcé d'une sanction disciplinaire fait l'objet d'un débat contradictoire

dans la plupart des cas

Le détenu dispose de trois jours ouvrables, à compter de la réception de la notification de la sanction, pour présenter sa défense écrite ou pour comparaître devant l’instructeur et plaider verbalement.

La personne détenue peut être assistée d’un avocat

oui

La personne détenue peut être assistée d’un avocat pour préparer sa défense. La présence d’un avocat n’est pas autorisée en commission disciplinaire.

Toute sanction disciplinaire est prononcée par un organe collégial, la commission disciplinaire. L’article 276 du Règlement pénitentiaire dispose que la Commission de discipline est présidée par le directeur de l’établissement et composée des personnes suivantes : le directeur-adjoint du régime, le directeur-adjoint de la sécurité, un juriste de l’établissement, un chef de service et un membre du personnel pénitentiaire (choisi annuellement).

La personne détenue peut faire appel d’une sanction disciplinaire

oui

Les recours sont présentés au directeur de l’établissement qui les transmet à l’autorité judiciaire. Une copie sous pli fermé est remise à la personne détenue.

Les sanctions disciplinaires peuvent être collectives

non

Le placement à l'isolement est utilisé à des fins de

  • sanction
  • protection de la personne
  • sécurité

L’isolement préventif est appliqué pour “protéger la vie ou l’intégrité physique du détenu et pour la sécurité et le bon ordre de l’établissement”. Il fait parfois l’objet d’un usage arbitraire.
Les auteurs d’infractions à caractère sexuel ou les personnes appartenant à la communauté LGBTI peuvent être placées dans des quartiers d’isolement afin de garantir leur sécurité. Elles peuvent aussi, de manière officieuse, être placées à l’infirmerie ou au quartier des arrivants. Les fonctionnaires de différents corps d’Etat condamnés sont placés, par mesure de protection, dans des quartiers à part.
Le placement à l’isolement disciplinaire (article 42 de la loi pénitentiaire) est appliqué en cas de faute grave (agression, violence ou perturbation récurrente et sérieuse de la vie collective). Un détenu peut être placé à l’isolement en cas de détention d’objets interdits (armes, produits stupéfiants…).

Le placement à l'isolement se fait sur

  • ordre d’un magistrat
  • décision du directeur d’établissement
  • décision d’un surveillant

Le juge doit approuver la mesure d’isolement quand elle excède 14 jours (article 76 loi pénitentiaire). Le placement à l’isolement à l’initiative du directeur (article 75 du règlement pénitentiaire) ne prévoit ni défense ni recours.

La durée du placement à l’isolement est limitée

oui, pour les mesures disciplinaires

L’article 42 de la loi pénitentiaire réglemente la durée du placement à l’isolement disciplinaire. L’isolement ne peut dépasser quatorze jours ou sept week-ends consécutifs pour une faute disciplinaire. Cette durée est fixée à 42 jours au plus en cas de fautes disciplinaires multiples.

Le renouvellement est possible

non

Le CPT fait le constat dans plusieurs établissements, de périodes consécutives d’isolement à des fins disciplinaires renouvelées, après une interruption d’une seule journée.

Les mesures d’isolement s’exécutent dans un quartier dédié, présent dans tous les établissements. Les cellules disposent d’une surface d’environ 10 m2. Elles sont équipées d’un lit et d’une table métalliques scellés au mur, d’une étagère et d’une chaise. L’installation sanitaire (WC, lavabo et douche) est située dans la cellule. Le CPT juge la luminosité et la ventilation suffisantes. Les quartiers sont dotés d’un petit gymnase, d’une salle d’enseignement et de cours de promenade1.


  1. Comité européen pour la prévention de la torture, “Rapport de la visite du 27 septembre au 10 octobre 2016”, 2017, p.34. (en anglais) 

Les personnes détenues à l’isolement bénéficient de trois heures quotidiennes hors de la cellule. La promenade peut être partagée avec un autre détenu et les activités peuvent exceptionnellement réunir jusqu’à cinq personnes. Les cours sont peu accueillantes : grises, sans décoration ni végétation. L’horizon ne dépasse pas dix mètres.

Les personnes placées à l’isolement disciplinaire sont privées d’accès aux activités culturelles ou sportives. Cet accès est progressivement rétabli pour qu’elles puissent faire preuve de leur bonne conduite.

Les prisonniers sanctionnés sont privés de la visite de leurs proches. La durée de l’interdiction des appels téléphoniques doit être notifiée.