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Populations spécifiques

La population sous écrou compte 76 601 personnes au 1er janvier 2016. Parmi elles, 66 678 sont effectivement détenues, 9 923 personnes exécutent leur peine hors de la prison dont 9  429 sont placées sous surveillance électronique et 494 sont en placement extérieur.

L’inflation carcérale est un phénomène majeur depuis 40 ans. Entre 2002 et 2012, elle a été particulièrement forte : la population détenue a augmenté d’un tiers en passant de 48 594 à 64 787.

La population carcérale augmente beaucoup au cours de l’année 2016, atteignant 69 012 personnes détenues au 1er décembre. Cette nette augmentation laisse présager le dépassement du cap des 70 000 personnes détenues au cours de l’année 2017.

Les personnes en attente de jugement représentent 27% de la population détenue. La population carcérale est essentiellement masculine (96,8 %) et l’âge moyen est, au 1er janvier 2015, de 34,6 ans.

23 % des personnes détenues condamnées effectuent une peine de cinq ans ou plus, dont 1 % sont condamnées à une peine de réclusion criminelle à perpétuité. 36 % effectuent une peine de moins d’un an.

La surpopulation carcérale résulte du prononcé de peines plus dures avec une augmentation des durées de détention (en moyenne, 8,4 mois en 2002, contre 10,8 mois en 2012) et non pas d’une augmentation du nombre d’entrées.

Cette surpopulation se concentre essentiellement dans les maisons d’arrêt où sont incarcérés les prévenus et les personnes condamnées à de courtes peines (carte). En principe ces deux populations sont séparées. Elle affecte aussi davantage les établissements d’Outre-Mer.

L’administration pénitentiaire ne publie qu’un indicateur de la surpopulation globale. Cela minimise l’ampleur du phénomène car il est fondé sur la capacité globale des établissements alors que certains ont des places vacantes et d’autres connaissent une surpopulation très élevée. La publication du nombre de personnes détenues en surnombre reflèterait mieux la réalité du problème. Par exemple, au 1er janvier 2016, le ministère de la Justice indique une surpopulation globale de 13,8 % alors qu’il y a en fait 22% de personnes détenues en surnombre.

On compte, au 1er janvier 2016, 12 964 personnes détenues en surnombre. 85 établissements ont une densité carcérale supérieure à 120 %, dont la maison d’arrêt de Nîmes (196,4 %), le centre de détention de Ducos (139,4 %) et la maison d’arrêt de Toulon-la-Farlède (177,4 %). Quatre établissements ont un taux d’occupation qui dépasse 200 % : la maison d’arrêt et le centre de détention de Faa’a Nuutania à Tahiti, la maison d’arrêt de La Roche-sur-Yon et la maison d’arrêt de Ducos en Martinique.

En 2016, les conditions de détention entraînées par la surpopulation carcérale sont dénoncées à de multiples reprises.

L’OIP-SF soutient 23 personnes qui ont adressé des requêtes à la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). L’objectif est d’obtenir une condamnation de la France en raison de la surpopulation dans plusieurs de ses prisons.

Le Comité européen pour la prévention de la torture (CPT) effectue une visite, en novembre 2015, et remet un rapport alarmant à la France : “Les mauvaises conditions matérielles de détention et la surpopulation constatées dans certains établissements pénitentiaires combinées à l’absence de régime, notamment dans les maisons d’arrêt de Fresnes et de Nîmes, pourraient être considérées comme un traitement inhumain et dégradant”.

Enfin, suite à sa visite du centre pénitentiaire de Fresnes, en octobre 2016, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) publie des recommandations en urgence. Il indique que “le nombre de personnes détenues au centre pénitentiaire de Fresnes a augmenté de plus de 52 % en dix ans, passant de 1960 en 2006 à 2989 en 2016. Pour la seule maison d’arrêt des hommes, le taux d’occupation moyen est de 188 %. […] La surpopulation touche de nombreux établissements pénitentiaires français, mais à Fresnes, son caractère massif et durable lui confère un caractère particulièrement indigne”.

Prévenus

27 %

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01/01/2016
/ Administration pénitentiaire

La plupart des femmes sont incarcérées dans des quartiers spécifiques au sein de prisons accueillant majoritairement des hommes. Dans quelques établissements pénitentiaires la détention des femmes se déroule dans un bâtiment autonome ou distinct de celui des hommes, comme à Fresnes ou Fleury. Une seule prison leur est exclusivement dédiée : le centre pénitentiaire de Rennes.

La densité est très variable d’un établissement à un autre et la surpopulation est problématique uniquement dans les quartiers pour femmes de certaines maisons d’arrêt. Le personnel de surveillance est féminin, mais l’encadrement peut comporter des personnels masculins.

Les femmes qui donnent naissance au cours de leur incarcération peuvent garder leur enfant auprès d’elle jusqu’à leurs 18 mois. Des quartiers nurserie de quelques places sont installés dans certains établissements pour accueillir les femmes enceintes ou les mères incarcérées avec leur enfant. Les cellules possèdent un équipement spécifique : bac-baignoire, espace distinct pour la mère et l’enfant.

Bien que toutes les dispositions doivent être prises pour que les femmes enceintes détenues bénéficient d’un suivi médical adapté (suivi prénatal obligatoire, aménagements des escortes pénitentiaires dans le cadre d’extractions médicales), des examens gynécologiques ou des accouchements se pratiquent encore en présence de personnels pénitentiaires. Ils entraînent parfois des renoncements aux soins.

Les femmes incarcérées sont réparties entre 57 établissements qui comptent 2 468 places réservées aux femmes sur l’ensemble du territoire. Au 1er janvier 2016, elles sont 2 147, ce qui représente 3,2 % de la population carcérale. Le centre pénitentiaire de Lille-Loos-Sequedin héberge 113 femmes dans 160 places alors qu’à Marseille, 104 détenues se partagent 67 places pour un taux d’occupation de 155 %.

Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) identifie les principales difficultés auxquelles sont confrontées les femmes en détention dans un avis du 18 février 2016 : un maintien des liens familiaux rendu difficile par un maillage territorial inégal des établissements, une gestion individualisée de la détention plus compliquée, un accès limité aux équipements communs et aux activités à cause du principe de séparation stricte, un choix très réduit des produits d’hygiène féminine (tampons ou serviettes hygiéniques, savon de toilette intime…) et un accès restreint au régime de semi-liberté.

Les enfants nés au cours de l’incarcération de leurs mères sont au nombre d’une soixantaine environ chaque année. 30 établissements disposent d’un quartier nurserie. Au centre pénitentiaire de Toulouse Seysse, la nurserie compte 3 places et celle du centre pénitentiaire de Rennes, 5 places.

Un témoignage d’une mère détenue recueilli par l’OIP en 2016 donne un aperçu de l’expérience de l’incarcération avec son enfant : “J’ai eu mon dernier fils alors que j’étais détenue. Il est resté avec moi jusqu’à 18 mois. Ma vie en détention avec lui s’est bien passée mais j’ai eu peu à peu de grandes difficultés avec le personnel pénitentiaire qui s’est désintéressé de lui. Il était comme un détenu. La nursery à Seysses ressemble à un mouroir : pas d’activités, juste des sorties dans une cour de 25m2”.

Nombre d'établissements pour femmes

57

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Administration pénitentiaire

Femmes détenues

3,2 %

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01/01/2016
/ Administration pénitentiaire

Les enfants peuvent être incarcérés à partir de l’âge de 13 ans. Leur emprisonnement reste exceptionnel en dessous de 16 ans. Les juridictions pénales pour enfants sont spécialisées, en vertu de l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante. Le juge des enfants, le tribunal pour enfants, et la cour d’assises des mineurs répondent à une procédure distincte de celle des majeurs (prise en compte de l’atténuation de la responsabilité, audiences à huis clos, etc.). Au cours de l’année 2016, la justice des mineurs évolue : le Tribunal correctionnel pour mineurs qui faisait intervenir un juge des enfants aux côtés d’autres juges est finalement supprimé, et il devient impossible de prononcer une peine de réclusion criminelle à perpétuité à l’encontre d’un enfant.

Les enfants incarcérées sont au nombre de 708 au 1er janvier 2016. Ils représentent 1,1% des personnes détenues. 249 mineurs sont détenus dans six établissements pénitentiaires pour mineurs (EPM) et les autres sont répartis entre les 46 quartiers pour mineurs (QM). Les EPM accueillent exclusivement des personnes de moins de 18 ans. Les QM sont intégrés à des établissements qui accueillent aussi des majeurs. Les EPM disposent d’une capacité moyenne de 60 places. Avec 1 146 places réservées aux mineurs, le taux d’occupation moyen est de 62%. L’affectation en EPM ou en QM doit être liée à l’intérêt personnel de l’enfant, en tenant compte de son lieu de vie habituel, des besoins en termes de prise en charge éducative, ou de la proximité de la juridiction en charge du dossier.

Des éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse sont présents auprès des mineurs dans les EPM et dans les QM. Les autres personnels (surveillance, santé) sont, en principe, spécialement formés. Personnels pénitentiaires et personnels éducatifs font état des difficultés qu’ils rencontrent dès lors que les places sont massivement occupées. L’enseignement est obligatoire jusqu’à 16 ans.

Dans les QM, le régime de détention doit être adapté pour empêcher tout contact avec les majeurs. Ils disposent souvent de cellules individuelles mais ce n’est pas toujours le cas. Dans les EPM, le régime de détention se caractérise par l’alliance du répressif et de l’éducatif. La vie collective (activités culturelles et sportives) est privilégiée et parfois jugée excessive. Sauf exception, ils sont seuls en cellule.

La séparation entre les mineurs et les majeurs n’est pas toujours effective, surtout pour les jeunes filles qui ne peuvent être accueillies que dans trois EPM. Lors de sa visite à la maison d’arrêt d’Épinal en avril 2015, le CGLPL relève que trois jeunes filles étaient hébergées parmi les femmes majeures.

La formation spécifique “référent mineur” n’est pas toujours suivie par les surveillants affectés aux QM, comme le constate le CGLPL lors de sa visite de la maison d’arrêt de Strasbourg en 2015. A ce moment, seuls deux surveillants du QM sur six avaient suivi cette formation.

Suite à une enquête en 2016 le Défenseur des droits constate que pour les enfants incarcérés, le « suivi de la scolarité gagne en complexité, notamment en raison de la lourdeur de l’organisation des déplacements individuels en milieu carcéral, particulièrement pour les mineurs détenus en quartiers pour mineurs ».

Nombre d'établissements pour mineurs

6

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Administration pénitentiaire

Mineurs détenus

1,1 %

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01/01/2016
/ Administration pénitentaire

Si aucun principe n’exige le regroupement des personnes étrangères dans des quartiers spécifiques, la pratique du “tri ethnique” non institutionnelle et non généralisée, perdure. Elle engendre une répartition au sein des quartiers de détention fondée sur la nationalité ou les origines, réelles ou supposées, voir sur le seul critère de couleur de peau des personnes détenues. Certains détenus demandent de pouvoir être avec des personnes avec lesquelles elles peuvent communiquer.

Les personnes étrangères sont victimes de discriminations dans l’accès au travail, aux aménagements de peine, et au maintien des liens familiaux. Elles sont plus vulnérables quand elles ont des difficultés dans la maîtrise de la langue française car toutes les demandes doivent être formulées par écrit (rencontrer le médecin par exemple), une démarche parfois impossible. Le recours à l’interprète, en théorie garanti aux différentes étapes de la procédure y compris disciplinaire, est insuffisant, voire inexistant. Les problématiques du droit au séjour viennent s’ajouter au quotidien difficile de la prison car l’incarcération est un réel obstacle pour entreprendre toutes les démarches.

Le séjour irrégulier n’est plus, en soi, une infraction pénale mais les comportements qu’il induit peuvent entraîner une condamnation.

Les personnes étrangères détenues, au 1er janvier 2015, représentent 19 % de la population pénale (12 591 personnes détenues). 49,1 % d’entre elles sont issues d’Afrique, 38 % d’Europe, 7,4 % du continent américain, 4,4 % d’Asie et d’Océanie et 1,1 % d’autres pays. Pour 2016, on ne dispose que d’une estimation provisoire du nombre d’étrangers sous écrou qui serait de 14 963 au 1er janvier 2016 (contre 14 690 au 1er janvier 2015).

Les réformes législatives de ces deux dernières années ont rendu encore plus complexes les démarches pour les personnes étrangères détenues. Les procédures de demande d’un titre de séjour prévoient des rendez-vous en préfecture obligatoires. Les personnes incarcérées doivent donc demander des permissions de sortir qui, bien souvent, ne sont pas accordées. Les entretiens pour les demandeurs d’asile peuvent désormais se dérouler au sein des prisons grâce à un moyen de communication audiovisuelle mais avec toutes les difficultés que cela suppose : confidentialité, mise en confiance, interprétariat, etc. Enfin, les personnes qui font l’objet d’une obligation de quitter le territoire français bénéficient systématiquement d’un délai de recours de seulement 48h alors qu’il est très complexe de faire des démarches en détention.

Dans son rapport d’activité de 2016, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) signale que les personnes prévenues ou condamnées pour une durée inférieure à trois mois sont exclues des procédures de renouvellement de titres de séjour.

L’année 2016 est marquée par plusieurs situations de personnes mineures isolées étrangères déclarées majeures qui sont incarcérées pour fraude.

Les courriers reçus régulièrement par la CIMADE, une association qui accompagne les personnes détenues étrangères dans leurs démarches, illustrent les difficultés auxquelles elles peuvent être confrontées. En novembre 2016, une personne prévenue qui souhaite renouveler son titre de séjour écrit : “Je n’ai pas la possibilité de faire de demande de permission de sortie. Auriez-vous la possibilité de m’aider dans mes démarches car la SPIP m’a conseillé de remplir un formulaire sur internet… Vous conviendrez que cela m’est impossible.”. Une autre personnes étrangère sollicite l’association en juin 2016 alors qu’elle rencontre des difficultés pour écrire : “*J’ai pas du cart didentité français. Je demande de me aider pour mes papiers, je ne suis pas capable de ecrire. Merci.”*.

Étrangers détenus

19 %

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01/01/2016
/ Administration pénitentiaire

En détention elles sont souvent victimes d’actes homophobes ou transphobes : violences verbales, physiques, agressions sexuelles.

L’affectation des personnes trans se fait en fonction de l’état civil. L’aménagement de leur vie quotidienne est soumis à l’appréciation, au cas par cas, du personnel pénitentiaire. Elles sont souvent placées en quartier d’isolement pour préserver leur sécurité mais cela rend l’accès au travail et autres activités difficile, voire impossible. L’accès aux soins est un problème majeur. Elles ne bénéficient d’aucune information relative aux modalités de leur prise en charge médicale. L’offre de soins ne dépasse pas celle existant dans l’établissement.

L’OIP a recueilli le témoignage d’une femme trans qui a vécu une période d’incarcération de huit mois à la maison d’arrêt des hommes de Fleury-Mérogis entre 2015 et 2016. Elle évoque le sentiment de solitude et l’accès très limité aux activités, y compris avec les autres personnes placées au quartier d’isolement. “J’ai eu des cours de français, mais à la fin de l’année, je n’ai pas pu participer à la réunion avec les trois ou quatre élèves du quartier d’isolement, parce qu’ils étaient hommes et que j’étais trans”. Elle regrette que les surveillants ne soient pas davantage formés à la situation des personnes trans car les humiliations sont courantes. “Un jour de janvier, ils sont venus à quinze ou vingt. Ils rigolaient en nous regardant. On s’est senties exhibées comme au zoo.”.

La Constitution française affirme que “nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public.”

Certaines catégories de prisonniers, en particulier des basques et des corses se revendiquent toutefois “détenus politiques”. Ils sont détenus, non pour leurs opinions, mais pour les infractions que leurs opinions les ont amené à commettre. L’administration disperse ces personnes dans différents établissements afin qu’elles ne soient pas regroupées. Cela a des conséquences sur le maintien de leurs liens familiaux. Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) demande pour eux un accroissement du temps de visite, un usage plus important des unités de vie familiales, une gestion plus souple des retards.

En septembre 2016, 80 prisonniers basques, dont 16 femmes, sont incarcérés dans 24 établissements pénitentiaires. Une liste de 2015 fait état de 23 “prisonniers politiques” corses. Les basques sont 70 à être incarcérés à plus de 400 km de leur lieu d’origine alors que les prisons les plus proches de Mont de Marsan et Lannemezan ont des capacités d’accueil suffisantes. Le temps moyen du trajet effectué par les proches pour exercer leur droit de visite est de 7h30 pour le simple aller.

3 021 personnes détenues, au 1er janvier 2015, sont âgées de 60 ans ou plus (3,9 % du total). Un chiffre multiplié par six en 25 ans. Près de la moitié le sont pour des infractions à caractère sexuel.

Les personnes âgées détenues ne sont pas regroupées dans des établissements ou quartiers spécifiques. Les établissements ne sont pas conçus pour les accueillir : le rythme de vie de la prison et son organisation sont sources d’angoisse. Il est constaté un manque d’activités adaptées, un accès restreint au travail et une prise en charge médicale trop faible. Les médecins signalent aussi des difficultés à se procurer des équipements médicaux. Les personnes âgées détenues ont difficilement accès aux aides humaines et sont souvent contraintes de requérir l’aide d’autres détenus.

Lorsque les personnes arrivent en fin de vie, la libération conditionnelle est privilégiée. Une autre procédure de suspension de peine pour raisons médicales autorise aussi les détenus dont le pronostic vital est engagé à finir leurs jours auprès de leurs proches. Cependant ces procédures ne peuvent pas toujours être mises en place, le plus souvent faute d’hébergement à la sortie. Certaines personnes âgées sont donc contraintes de vivre leurs derniers jours en détention, avec un personnel qui n’a ni la formation, ni les moyens pour accompagner correctement la personne concernée.

L’OIP rapporte la situation d’un homme détenu au centre pénitentiaire de Lannemezan qui décède des suites d’un cancer en octobre 2016. En juin et en août de cette année, il s’est vu refuser une suspension de peine pour raison médicale faute de solution d’hébergement adapté. Le chef d’établissement indique qu’il était parfois dans l’impossibilité complète de s’alimenter et ne pouvait pas compter sur l’aide de ses codétenus pour satisfaire ses “besoins primaires et essentiels”.

La population carcérale présente une moins bonne santé que la population générale. La proportion de personnes séropositives est quatre à six fois supérieure à celle de l’extérieur : selon l’enquête PREVACAR de 2010, 2% des personnes détenues sont infectées par le VIH. En ce qui concerne l’hépatite C, la même étude a conclu à une prévalence plus élevée encore : près de 5% de la population carcérale est atteinte par le virus de l’hépatite C. Les femmes détenues sont particulièrement touchées : elles sont près de 12% à être infectées par l’hépatite C. La prévalence de la tuberculose est dix fois supérieure.

La santé mentale est particulièrement fragile : 25% des personnes détenues souffrent de troubles psychotiques (selon une étude conjointe des ministères de la Justice et de la Santé publiée en 2006), entre 30 et 50% d’entre elles ont un traitement médicamenteux, souvent à visée psychotrope. Une enquête de Human Right Watch, publiée en avril 2016, a notamment pointée les souffrances supplémentaires induites par l’incarcération sur les personnes souffrant de troubles mentaux et les difficultés d’accès aux soins de santé mentale, en soulignant que les conditions de détention aboutissent, dans la plupart des cas “à une nouvelle détérioration de la santé mentale”.

Peu d’établissements disposent de structures adaptées aux personnes en situation de handicap. Certains services (parloirs, salles d’activités) sont inaccessibles lorsqu’il n’y a pas d’ascenseur ou de rampe d’accès par exemple. La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) condamne la France, le 19 février 2015, pour avoir maintenu en détention M. Mohamed H., paraplégique et incontinent, sans soins de rééducation et dans des conditions inadaptées à sa situation (absence de soins en kinésithérapie, nécessité de faire appel à un codétenu pour faire sa toilette en l’absence de douches aménagées). L’OIP-SF fait aussi état du témoignage d’un détenu malvoyant incarcéré à Fresnes, jusqu’en janvier 2016, dans une cellule inadaptée, renonçant progressivement à aller en cours de promenade, et n’ayant accès à aucune activité.

L’inadaptation des locaux peut également affecter les proches rendant visite à une personne détenue lorsqu’ils sont eux-mêmes handicapés. Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL), suite à une visite à la maison d’arrêt de Privas les 23 et 24 mai 2016, constate que l’épouse d’une personne détenue est contrainte de passer le portique de sécurité sans sa canne et sans aide alors qu’elle a besoin d’un accompagnement et d’une canne pour se déplacer, ce qui est attesté par sa carte d’invalidité et un certificat médical.

Les personnes malades peuvent faire l’objet d’une libération anticipée lorsqu’est établie une pathologie engageant le pronostic vital, ou que leur état de santé est incompatible avec le maintien en détention (296 demandes de suspension de peines pour raisons médicales en 2012 pour 253 accords, selon un rapport ministériel de 2013). Même si les conditions d’octroi ont été assouplies ces dernières années (concernant les certificats médicaux), elles restent restrictives. Une personne détenue à Lannemezan, gravement malade, voit sa suspension de peine refusée après que deux expertises médicales aient conclu que son état de santé était incompatible avec une incarcération et qu’une troisième expertise conclut à la possibilité de rester en détention à condition de recevoir les soins adaptés. Pourtant, la loi ne prévoit plus qu’une seule expertise médicale pour les demandes de suspension de peine.

Si la prise en charge sanitaire s’est grandement améliorée depuis les années 90 (voir la rubrique dédiée), on constate encore trop souvent des défauts de prise en charge criants. Ainsi, le 12 février 2016, un homme de 36 ans décède d’un ulcère perforé, sans avoir pu être pris en charge par les services médicaux. Il était incarcéré depuis plus d’un an et avait perdu plus de 20kg les mois précédant son décès. Selon les mots de son épouse : “Adil est mort en prison, en France, au XXIe siècle, d’un ulcère dont il souffrait horriblement depuis des mois et qui n’aura jamais été diagnostiqué ni traité. Malgré ses demandes incessantes auprès de l’administration pénitentiaire et du service médical.”.