Garanties

Toutes les personnes détenues sont admises en prison avec un ordre d'incarcération valable

non

Le Code pénitentiaire dispose qu’une personne ne peut être détenue qu’en vertu d’un arrêt ou d’un jugement de condamnation, d’un mandat de dépôt, d’un mandat d’arrêt, d’une ordonnance de prise de corps ou d’une mesure de contrainte par corps. Toute détention ou admission d’une personne dans un établissement pénitentiaire pour une autre raison est qualifiée d’arbitraire et est passible de sanctions disciplinaires et/ou pénales (Code pénitentiaire, articles 2 et 3).

Des organisations de la société civile font état de nombreux cas de détention arbitraire.

Des interpellations dans plusieurs affaires relatives à la sûreté de l’État suscitent des inquiétudes quant à la validité de leur ordre d’incarcération. Il arrive que des personnes citées ou suspectées dans une affaire soient interpellées à n’importe quel moment, sans motif valable d’arrestation. Ces personnes sont arrêtées en dehors de toute procédure judiciaire, sans réquisition du parquet ou du juge d’instruction.1

Les personnes détenues sont en mesure d’informer sans délai un proche de leur détention

non

Le Code pénitentiaire prévoit le droit pour toute personne détenue d’avoir la possibilité et les moyens d’informer immédiatement sa famille ou toute autre personne qu’elle aura désignée comme personne à contacter, de sa détention, de son transfèrement, de sa translation judiciaire1 et de toute maladie ou blessure grave (article 77).

La Fédération internationale des ACAT (FIACAT) et l’ACAT Congo signalent que les registres (précisant identité, jour et heure du placement en garde à vue) ne sont pas tenus régulièrement à jour dans les postes de sécurité publique ou les brigades de gendarmerie. Les personnes peuvent y passer des mois avant d’être placées en détention provisoire dans une maison d’arrêt.

“[…] En pratique ces registres de main courante sont mal entretenus (il s’agit parfois d’un simple papier volant sur lequel certaines de ces informations sont parfois mentionnées) voire inexistants. Cette pratique rend parfois difficile la recherche d’un parent porté disparu ou arrêté au hasard des chemins par les policiers dont on ne connait pas le commissariat. La famille est alors contrainte de faire la ronde de tous les commissariats et les policiers se trouvent obligés de procéder à l’appel des personnes qui sont dans les geôles.”, affirment la FIACAT et l’ACAT Congo.2


  1. Transfert d’une personne détenue vers un autre établissement pénitentiaire sur réquisition d’un juge en cas, par exemple, d’audition, instruction ou comparution. 

  2. Fédération internationale des ACAT, “Rapport alternatif de la FIACAT et l’ACAT Congo pour l’adoption d’une liste de points à traiter avant présentation du rapport du Congo, 129ème session”, 8 juin 2020, p. 12. 

Des quartiers arrivants sont présents

dans aucun établissement

Un exemplaire du règlement intérieur est mis à disposition des personnes détenues

non

L’arrêté du 15 septembre 2011 fixe un règlement intérieur des maisons d’arrêt du pays.

Le nouveau Code pénitentiaire du pays, établi par la Loi du 20 avril 2022, prévoit un règlement intérieur-type des établissements pénitentiaires. Il dispose également que les personnes détenues doivent être informées, à leur arrivée, des règles applicables au sein de l’établissement pénitentiaire. Ces règles doivent demeurer accessibles pendant toute la durée de la détention. Les différents recours et requêtes que les personnes détenues peuvent formuler doivent également leur être présentés (articles 19 et 75).

Ces dispositions du Code pénitentiaire ne sont, à ce jour, pas respectées. La détention se déroule fréquemment dans des conditions floues pour les personnes incarcérées.

Les critères d’affectation en cellule semblent fluctuer selon les maisons d’arrêt, en raison de l’absence de cadre réglementaire.
Des cellules dites “V.I.P.” sont présentes dans les maisons d’arrêt de Brazzaville et de Pointe Noire. Les personnes détenues y sont placées en fonction de leurs moyens financiers et de leur notoriété. Les conditions matérielles y sont largement différentes de celles des dortoirs ordinaires. Les personnes détenues “V.I.P.” ont accès, par exemple, à un lit, à la télévision et une moustiquaire. Elles sont épargnées de l’insalubrité des dortoirs surpeuplés.

Le recours à un avocat est autorisé à tout moment de la détention

oui

La législation prévoit l’existence d’une assistance judiciaire (aide juridictionnelle), partielle ou totale, pour les personnes n’ayant pas les ressources suffisantes.

Une assistance judiciaire totale est prévue pour les personnes percevant des ressources mensuelles inférieures ou égales au salaire minimum. Une assistance partielle est établie pour les personnes (Loi du 20 janvier 1984 portant réorganisation de l’assistance judiciaire, article 5) :

  • percevant un revenu inférieur ou égal à 50 000 francs CFA (76 €)

  • ou dont les revenus sont entre 50 000 francs CFA et 80 000 francs CFA (122 €) qui ont trois personnes à charge.

En pratique, les avocats commis d’office ne sont systématiquement accessibles que pour les personnes impliquées dans des affaires criminelles et pour les mineurs. Des associations font état d’un grand manque d’avocats. La plupart d’entre eux exercent à Brazzaville et à Pointe Noire. Les personnes les moins favorisées n’auraient que peu, voire aucun accès à un avocat.

Un point d’accès au droit est à disposition des personnes détenues

non

Les dispositions du Code pénitentiaire sur ce sujet ne semblent pas être appliquées. Plusieurs organisations de défense des droits expliquent qu’il est très difficile de faire parvenir des informations sur l’accès au droit aux personnes détenues. Elles rencontrent de nombreux obstacles à l’entrée dans les établissements pénitentiaires. Elles disent s’adapter et chercher des solutions innovantes pour contourner le manque d’autorisation et assister les personnes détenues.

La réglementation nationale prévoit la possibilité pour les avocats de rendre visite à leurs clients tous les jours, entre 7h et 16h (Règlement intérieur des maisons d’arrêt, article 12). En pratique, ces rencontres ne se déroulent pas toujours dans un espace physique approprié et respectueux de la confidentialité.

Les décès en détention sont consignés sur un registre

oui

Ces informations ne sont pas rendues publiques.

Nombre de décès en détention

Non communiqué

L’Observatoire congolais des droits de l’Homme (OCDH) fait état d’une trentaine de décès entre 2017 et 2018. Neuf d’entre eux ont eu lieu à la prison d’Ouesso. L’OCDH attribue ces décès aux mauvaises conditions de détention, en particulier la vétusté des locaux et le manque de nourriture.

Nombre de décès attribués à un suicide

Non communiqué

Taux de mortalité en détention (pour 10 000 prisonniers)

Non communiqué

Taux de suicide en détention (pour 10 000 prisonniers)

Non communiqué

Taux de suicide dans la population nationale (pour 10 000 habitants)

0,65

i

L'administration est tenue d’informer l’autorité judiciaire

de tous les décès

La direction de l’établissement est tenue d’ouvrir une enquête interne et de signaler tout décès, disparition et blessure grave au procureur de la République et au procureur général près la Cour d’appel du ressort (Code pénitentiaire, article 29)

L’administration pénitentiaire est tenue de traiter la dépouille de toute personne décédée avec respect et dignité. La dépouille doit être rendue à son parent le plus proche dans un délai raisonnable, une fois l’enquête achevée (Code pénitentiaire, article 30).

De nombreuses organisations font état de cas de torture, de violence et de mauvais traitements envers les personnes détenues. Ces pratiques seraient particulièrement répandues dans les commissariats de police et gendarmeries.

La FIACAT et l’ACAT Congo signalent que, malgré son interdiction, des actes de torture sont toujours pratiqués. Elles indiquent que les tortionnaires seraient protégés par leur hiérarchie. Une enquête conduite par l’ACAT Congo dans les deux maisons de détention les plus surpeuplées, celles de Brazzaville et de Pointe Noire, révèle que “81,41 % des personnes interrogées au sein de ces deux prisons et ayant été détenues dans les postes de sécurité publique ou brigades de gendarmerie, ont été l’objet de torture ou de traitements cruels, inhumains ou dégradants”.1

L’OCDH renseigne et fournit une assistance à des dizaines de personnes victimes de torture ou de mauvais traitements, ainsi qu’aux proches de celles décédées. La plupart des sévices ont lieu à la suite d’arrestations arbitraires par les forces de police.

La prohibition de la torture est inscrite dans la Constitution et dans la loi

seulement dans la Constitution

La Constitution interdit tout acte de torture, de traitement cruel, inhumain ou dégradant (article 11). Ces dispositions sont également inscrites dans le code pénitentiaire (article 78). La direction de chaque établissement pénitentiaire est tenue de signaler au procureur de la République et au procureur général près la Cour d’appel du ressort tout acte de torture, ou traitement cruel, inhumain ou dégradant même si aucune plainte n’a été formulée (Code pénitentiaire, article 29).

L’interdiction de la torture n’est pas inscrite dans le Code pénal. La réforme de celui-ci, annoncée depuis 2008, n’est toujours pas aboutie.

La Convention contre la torture des Nations unies (CAT) est

ratifiée en 2003

Nations unies, Base de données relative aux organes conventionnels de l’ONU, Les organes des traités des droits de l’homme _ Statut de ratification pour Congo

Aucune politique de prévention de la torture n’est mise en œuvre par les autorités.

La torture n’est définie dans aucune disposition législative ou réglementaire. L’absence de définition constitue, selon des organisations de la société civile, un obstacle pour la conduite d’enquêtes et la poursuite des auteurs. “Les enquêtes sont presque inexistantes ou ne répondent pas toujours à l’exigence d’indépendance et d’impartialité”, affirme l’ACAT Congo dans un rapport en 2020. Les victimes craignent les représailles et n’ont, en réalité, aucune voie de recours.1 Cela les découragerait de porter plainte et de faire confiance aux institutions judiciaires.2


  1. Fédération internationale des ACAT, “Rapport alternatif de la FIACAT et l’ACAT Congo pour l’adoption d’une liste de points à traiter avant présentation du rapport du Congo, 129ème session”, 8 juin 2020, p. 9. 

  2. Agir ensemble pour les droits de l’homme, Association pour les droits de l’Homme et l’univers carcéral, Observatoire congolais des droits de l’homme, “Rapport sur le portait de la torture en République du Congo à l’occasion de la journée consacrée par les Nations-Unies aux victimes de la torture”, 26 juin 2017, p. 19. 

Nombre de faits violents recensés entre détenus

Non communiqué

La FIACAT et l’ACAT Congo s’inquiètent des violences en détention. Ces deux associations rapportent, en 2015, que les nouveaux arrivants, majoritairement jeunes, “subissent des traumatismes dès leurs premiers instants en prison. Ils sont frappés et maltraités par les anciens avant leur placement en cellule.“ Il s’agit d’une forme de “baptême”, affirment les associations.

Le nombre de personnels de surveillance est très réduit et une hiérarchie parallèle informelle règne entre les personnes détenues. “Le plus ancien ou le plus aguerri des lieux assume des responsabilités en imposant son rythme et parfois en infligeant des amendes voire des sanctions aux autres détenus. Il reçoit également des tributs des autres détenus qui espèrent ainsi éviter d’être maltraités.”1 Un ancien détenu raconte à Prison Insider, en 2022, que chaque dortoir de la maison d’arrêt de Brazzaville dispose d’un coq, c’est-à-dire d’un chef. Celui-ci serait désigné, selon cet ancien détenu, par la direction de l’établissement ou les surveillants.

L’arrêté du 15 septembre 2011 fixant les attributions et l’organisation des services et des bureaux de la direction générale de l’administration pénitentiaire, (article 39) interdit les rixes, les injures et toutes formes de violence.

Les personnes détenues peuvent adresser une requête ou plainte à l’administration pénitentiaire, au procureur de la République, au juge de l’application des peines ou à toute autre autorité compétente. L’administration pénitentiaire est tenue d’acheminer la requête ou la plainte à l’autorité destinataire avec avis de réception (Code pénitentiaire, article 109).

Ces dispositions ne sont pas appliquées. Les dispositifs existants ne permettent pas aux personnes détenues de porter plainte contre l’administration pénitentiaire, que ce soit pour les mauvais traitements ou actes de torture, ou pour les conditions de détention. L’analphabétisme, fortement présent parmi la population carcérale, serait un obstacle supplémentaire.

Aucune instance indépendante n’est spécialisée pour recevoir des plaintes. Des organisations de la société civile réalisent un travail de recensement et d’assistance aux victimes de mauvais traitements et de torture pour combler ce manque.

Le Protocole facultatif à la Convention contre la torture des Nations unies (OPCAT) est

signé en septembre 2008

Le Protocole n’est toujours pas ratifié. Plusieurs États adressent, lors des derniers Examens périodiques universels (EPU) du Congo en 2016 et 2020, des recommandations relatives à la ratification du Protocole et à la mise en place d’un mécanisme national de prévention de la torture (MNP).

  • signé en septembre 2008, ratifié en mai 2024

    La République du Congo ratifie, le 26 avril 2024, le Protocole facultatif à la Convention contre la torture des Nations unies.

    i
    01/05/2024
    / APT

Un MNP est créé

non

Une instance régionale contrôle les lieux de privation de liberté

oui

Le Rapporteur spécial sur les prisons, les conditions de détention et l’action policière en Afrique, l’un des plus anciens mécanismes spéciaux de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP), est habilité à examiner les conditions de détention des personnes privées de liberté dans tous les territoires des États parties à la Charte africaine sur les droits de l’homme et des peuples.

La Commission nationale des droits de l’homme (CNDH), organe de suivi de la promotion et de la protection des droits humains, peut exercer des visites de contrôle des établissements pénitentiaire et des commissariats de police. Ces visites font l’objet de rapports et de recommandations à destination des autorités (ministre de la Justice, Médiateur de la République). Ces documents ne sont pas rendus publics. La CNDH est un organe d’État qui dispose, à ce jour, de peu d’indépendance. Un projet de loi visant des nouvelles modalités sur le travail de la CNDH est en cours de négociation.

Quelques acteurs de la société civile sont autorisés à réaliser des missions de monitoring des prisons du pays, tels que l’ACAT Congo.

La loi prévoit un dispositif d’aménagement de peine

oui

Les personnes détenues peuvent, à tout moment, faire une demande de liberté conditionnelle. Cette demande peut être adressée à un juge d’instruction ou à un tribunal, selon la nature des chefs d’accusation.

L’octroi d’un aménagement de peine relève du juge d’application des peines (Code de procédure pénale, article 631).

La peine peut être aménagée dès son prononcé

oui

La peine peut être aménagée en cours d'exécution

oui

La loi prévoit un dispositif de permission de sortir

oui
i

Les demandes de permission de sortir sont examinées au cas par cas. “Chacun tente sa chance”, révèle un avocat. Elles sont notamment motivées par des questions familiales.

Nombre des personnes détenues ayant bénéficié d’une grâce présidentielle ou d’une amnistie

Non communiqué