Contributeur(s)Daniel Fink, Infoprisons

Dernières mises à jour

Les actes individuels de protestation sont recensés

oui

Certaines prisons, notamment celles qui sont surpeuplées, connaissent fréquemment des révoltes de moindre ampleur comme le refus des détenus de regagner leurs cellules après la sortie, donnant alors lieu à des négociations sur leurs revendications.

Les prisons très surpeuplées de Genève ont également connu des mouvements de protestation du personnel pénitentiaire.

  • Cinquante détenus de la prison de Thorberg (canton de Berne) entament une grève en novembre 2017. Ils refusent de travail et demandent, entre autres, plus de nourriture, des rémunérations meilleures et un espace destiné aux visites intimes. La grève dure une dizaine des jours. Certains détenus se voient imposer des sanctions disciplinaires à l’issue du mouvement, notamment des transferts vers d’autres établissements ou le placement au quartier disciplinaire.

    Soixante-trois détenus signent, en août 2017, une pétition contre le fonctionnement autoritaire du directeur de la prison de Bochuz (canton de Vaud). Les détenus mettent en cause la politique de libérations conditionnelles très restrictives, la vidéosurveillance lors des visites et la mauvaise gestion générale de l’établissement. Le directeur de la prison quitte son poste en mai 2018.

Le système pénal suisse fait une distinction entre les peines et les mesures qui peuvent être prononcées en plus de la peine. Ces mesures peuvent être de nature thérapeutique ou de sûreté. L’internement à vie (art. 64 du code pénal), imposable à certaines conditions, fait partie des mesures de sûreté. Il a été prononcé cinq fois dans le passé. Le Tribunal fédéral a annulé cette décision dans quatre des cinq cas prononcés. La forme moins sévère de l’internement de sûreté, révisée chaque année par une commission, n’est que rarement prononcé (deux jugements par an).

  • La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) condamne la Suisse, le 9 janvier 2017, pour avoir appliqué une mesure thérapeutique institutionnelle à un détenu à la fin de sa peine.

    Le plaignant passe près de sept ans en exécution de peine à la prison de Bostadel (canton de Zoug). Le canton de Bâle-Ville décide, en mars 2013, juste avant la fin de sa peine, de la transformer en une mesure thérapeutique au sens de l’article 59 du Code pénal suisse et de le soumettre ainsi à ce que l’on nomme le «petit internement».

    La personne privée de liberté passe ensuite quatre ans et demi dans une institution où il ne peut pas bénéficier d’une thérapie. La cour conclut à la violation de l’article 5 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif au droit à la liberté et à la sûreté.

    La Cour reproche notamment à la Suisse le fait que ce détenu se trouve, plus de quatre ans et demi après l’expiration de sa peine d’emprisonnement initiale, dans une institution manifestement inadaptée aux troubles dont il souffre. Une telle situation contrevient également au Code pénal suisse qui prévoit, en vertu de l’article 62c CP, que la mesure thérapeutique doit a priori être levée s’il n’y a pas ou plus d’établissement approprié. D’autres cas semblables ont été dénoncés, pour les mêmes motifs, donnant droit à une indemnisation. La Commission nationale de prévention de la torture (CNPT) “juge problématiques les placements inadéquats constatés, qui se traduisent souvent par une interruption anticipée de la mesure ou par sa prolongation perpétuelle”.

La loi prévoit un dispositif d'aménagement de peine pour raisons médicales

oui

Le code pénal permet dans certains cas d’interrompre l’exécution d’une peine ou d’une mesure.

La politique restrictive de libération de détenus âgés, voire très âgés, devrait cependant conduire à une augmentation des décès “naturels” en prison, phénomène rare jusqu’à présent.

  • Le Tribunal fédéral refuse pourtant, en 2014, la demande d’un homme atteint d’un cancer et de démence sénile, le détenu le plus âgé du pays, de se rapprocher des siens pour mourir. “La haute cour a jugé que la crédibilité du système pénitentiaire, l’effectivité des peines et l’égalité dans la répression pèsent plus lourd dans la balance que les intérêts du condamné. L’homme décède finalement à 90 ans dans l’unité cellulaire de l’hôpital cantonal”. (Infoprisons, bulletin n°14).

La surveillance et l’encadrement ne sont pas “délégués” à d’autres agents que ceux qui font partie de l’établissement.

Il est difficile d’offrir un jugement général sur les conditions de travail du personnel. La nature des établissements est très diverse et l’organisation de chaque administration pénitentiaire, Un grand nombre d’établissements sont correctement dotés en personnel. Certains sont néanmoins surpeuplées et les personnels pénitentiaires sont donc en sous nombre1. Cela est le cas par exemple dans les prisons du canton de Genève ou de Vaud.

L’Office fédéral de la justice préconise un rapport de huit agents de détention pour dix détenus. Les détenus souffrant de troubles psychiques nécessitent chacun un agent exclusivement dédié.

Aucune analyse sociologique du personnel pénitentiaire, de son origine sociale, de sa composition professionnelle, de son degré de syndicalisation, de ses carrières socio-professionnelles n’a été produite à ce jour.

Des chercheurs de l’Université de Berne viennent de réaliser une étude sur la satisfaction professionnelle du personnel pénitentiaire2. Cette étude sera renouvelée prochainement.


  1. Canton de Vaud, “Rapport du Conseil d’Etat au Grand Conseil concernant l’institution d’une Commission d’enquête parlementaire sur la gestion du Service pénitentiaire”, novembre 2017. 

  2. Hostettler, Ueli et Anna Isenhardt (2015). La situation des collaborateurs des établissements d’exécution des peines et des mesures en Suisse. Principaux résultats de l’enquête nationale. Dans : Informations sur l’exécution des peines et mesures –info bulletin 40(1):16-20 

  • Certains témoignages, rapportés à l’association Infoprisons, font état des conditions de travail précaires :

    “*Le climat est extrêmement tendu”, témoigne sous couvert d’anonymat un employé d’un établissement pénitentiaire. “Aujourd’hui, nous ne sommes plus en sécurité lorsqu’on travaille à la Colonie fermée. Imaginez un agent de détention seul pour vingt détenus. Il a la trouille. Les détenus le savent et en profitent.
    Aujourd’hui, on ne nous demande plus vraiment d’aider les détenus ni de leur permettre de trouver un sens à leur peine. Nous sommes tous devenus des tourne-clés. C’est tout. Et cela n’aide évidemment pas les détenus à progresser ou à être calmes “.