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L’intégrité physique

Abolie par une loi de 1981, la dernière exécution a eu lieu le 10 septembre 1977.

La réclusion criminelle à perpétuité sanctionne les crimes les plus graves.
Les personnes condamnées à une peine de réclusion criminelle à perpétuité (RCP) sont, au 1er janvier 2017, au nombre de 497. Onze d’entre elles l’ont été au cours de l’année 2016.
Les mineurs de 16 ans ne peuvent pas faire l’objet d’une peine de RCP. Les mineurs entre 16 et 18 ans peuvent, par exception et sous certaines conditions, être condamnés à une peine à perpétuité.

— Les conditions de détention

Les personnes condamnées à de longues peine connaissent notamment les difficultés suivantes : délitement des liens avec les proches, âge avancé, suradaptation à la vie carcérale, réinsertion problématique.
Les personnes condamnées à la réclusion criminelle sont habituellement placées dans des maisons centrales, établissements dont le régime de détention est largement axé sur la sécurité. Jean-Marie Delarue, Contrôleur général de lieux de privation de liberté (2008-2014), indique dans un dossier de Prison Insider consacré aux peines perpétuelles : “Je pense que les maisons centrales n’ont pas beaucoup changé de configuration, sauf que les derniers modèles qui ont été construits dans l’Orne et dans le nord de la France sont encore plus redoutables, encore plus privés de “nature” que les maisons centrales traditionnelles”.

La période de sûreté

Une “période de sûreté” exclut la possibilité d’un aménagement de peine pour une période de 18 ans. Cette période peut être minorée ou allongée, sous certaines conditions, jusqu’à 22 ans au plus. La peine à perpétuité dite “incompressible”, sanction pénale la plus importante du droit français, est assortie d’une période de sûreté illimitée. La peine à perpétuité “réelle” est applicable pour trois crimes particulièrement graves (certains assassinats et crimes de terrorisme).
Une possibilité de libération existe, dans les faits, pour les peines à perpétuité incompressibles. L’article 720-4 prévoit la possibilité de réexamen du dossier après 30 ans de réclusion. La décision du juge doit être accompagnée de l’avis de trois experts médicaux chargés d’examiner “l’état de dangerosité du condamné”.

Les longues peines

Le nombre de personnes condamnées à plus de dix ans, hors perpétuité, est de 9 091. Elles sont 102 (hors RCP), auxquelles il reste un reliquat de peine de plus de 20 ans.

L’administration pénitentiaire (AP) ne publie plus les chiffres relatifs à l’ensemble de décès en détention depuis 2013. Ils étaient alors de 242.

Chaque année, près de 250 personnes décèdent en prison.

Près de la moitié de ces décès sont imputables à des suicides1 : on se suicide sept fois plus en prison qu’à l’extérieur selon une étude de l’Institut national d’études démographiques (INED 2014). Les maladies sont la principale cause de décès. Les homicides sont, en 2016, au nombre de six.

L’AP publie des chiffres-clés portant sur l’année 2016. Ils ne mentionnent pas le nombre total des décès en prison. Les décès survenus après la sortie ne sont pas comptabilisés (à l’hôpital des suites d’un suicide en détention, par exemple).

Un collectif d’associations recense, tous les ans, un certain nombre de décès en détention et organise un hommage aux morts de la prison.

Les suicides en détention

L’AP recense, dans ces chiffres-clés, le nombre de suicides pour l’année 2016. Ils sont au nombre de 113 en détention et 11 sous écrou hors détention (placement sous surveillance électronique, etc.). Ces chiffres étaient respectivement de 113 et 16 en 2015. Les tentatives avaient été au nombre de 1 166 en 2015 et de 1 033 en 2014.

Le taux de suicide est de 15.7/10 000 personnes détenues en 2016. Le journal Mediapart publie, en partenariat avec l’OIP-section française et Ban public, le 7 janvier 2018, une enquête sur les suicides en 2017. Il en recense 72. L’évaluation, élaborée à partir des seuls articles de presse parus, est partielle.

Certains facteurs comme l’entrée en détention, la détention provisoire, le placement en cellule disciplinaire et la rupture des liens familiaux multiplient le risque de suicide. Les politiques de prévention se succèdent mais ne parviennent pas à faire diminuer leur nombre de manière significative.

L’Institut national de veille sanitaire publie, en 2017, un rapport sur les décès sous écrou. Il confirme la sursuicidité observée en prison. Elle est particulièrement marquée chez les femmes : sur la période 2000 à 2010, les hommes se suicident 7.2 fois plus en détention qu’à l’extérieur et les femmes 20 fois plus. Malgré la prévalence élevée de troubles psychiatriques en prison, la rapport souligne que les suicides en détention sont environ trois fois moins souvent liés, dans les certificats de décès, à des pathologies psychiatriques que dans la population générale. Cette faible proportion pourrait “résulter de la conjonction de trois éléments : une absence de trouble psychiatrique chez certaines personnes écrouées décédées par suicide, un trouble psychiatrique non diagnostiqué sous écrou, ou encore un diagnostic psychiatrique méconnu par le médecin délivrant le certificat de décès”.

Un adolescent de 16 ans se pend, mercredi 13 décembre, vers 20 heures, dans sa cellule de l’établissement pénitentiaire pour mineurs de Lavaur. Il est le troisième, en France, dans les dix dernières années.


  1. Lire, à ce sujet, l’édito Une tragédie ignorée écrit par Didier Fassin pour Prison Insider. 

Nombre de décès

242

i
2013 - Administration pénitentiaire

Nombre de décès attribués à un suicide

113

i
2016 - Administration pénitentiaire

La violence fait partie du quotidien de la détention. Elle prend plusieurs formes : violences entre personnes détenues, violences émanant du personnel pénitentiaire ou dirigées contre le personnel, automutilations. Il peut s’agir de violences verbales (insultes, brimades, vexations) ou physiques.

Violence des détenus envers les personnels

Chaque établissement est tenu de recenser quotidiennement chaque incident et de le classer par catégorie. L’administration pénitentiaire (AP) comptabilise, pour l’année 2017, 4 314 agressions physiques contre le personnel, soit près de 12 par jour. Elles étaient 4 077 en 2016. La moyenne, pour les sept années précédentes, est stable : 4 124. Et ce malgré un nombre de personnes détenues, en augmentation significative, passé de 60 544 au 1er janvier 2011 à 69 714 au 1er décembre 2017. Ces violences résultent habituellement de certaines sanctions disciplinaires, de discriminations, de fouilles à nu.

— **Violence des surveillants envers des détenus **

L’AP ne publie pas les chiffres relatifs aux violences exercées par des personnels contre des détenus. Elles donnent très rarement lieu à des poursuites disciplinaires ou judiciaires.

Plusieurs situations de poursuites ou condamnations de personnels de l’administration pénitentiaire pour des violences sur des personnes détenues sont rapportées par la presse en 2017. Un lieutenant stagiaire est condamné, en janvier, au centre pénitentiaire du Maubeuge, à un an de prison, dont six mois avec sursis. Il est poursuivi pour vol d’argent lors d’une fouille de cellule et pour plusieurs faits de violences. Le tribunal correctionnel de Cayenne condamne, en novembre, un surveillant à trois mois de prison avec sursis pour avoir donné deux coups de pieds et deux coups de poing à un détenu.

Des surveillants de la maison de Fresnes ont, en mai 2014, fait un usage disproportionné de la force en récupérant un objet dissimulé par une personne détenue lors d’une fouille intégrale. Celle-ci lui occasionne une fracture de l’épaule droite entraînant une incapacité totale de travail de six semaines. Le Défenseur des droits est saisi via le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL). Le Défenseur des droits recommande, dans une décision de février 2017, de préciser le code de déontologie des services pénitentiaires afin que les circonstances ayant conduit à l’usage de la force, les gestes pratiqués, l’attitude de la personne détenue soient plus détaillés “et non comme c’est trop souvent le cas présentées lapidairement comme ‘un usage proportionné de la force’”. L’absence d’explications des personnels, l’absence de violence et d’agressivité de la part de la personne détenue et la gravité de la blessure justifient cette décision.

L’Observatoire International des Prisons - Section française (OIP) dénonce, en juillet 2017, le climat de tensions et de violences qui règne dans la maison d’arrêt de Villefranche-sur-Saône depuis plusieurs années. Des courriers et témoignages répétitifs et concordants sont reçus par l’association et font état “de cantines écrasées, de courriers déchirés”, de fouilles à nu abusives et même de violences physiques à l’encontre des personnes détenues. Une personne indique “sur le chemin, pour m’emmener au quartier disciplinaire, on m’a mis les menottes en me tordant les bras dans le dos et on me tordait les doigts”. De nombreuses personnes détenues utilisent des voies alternatives pour acheminer leurs courriers adressés au procureur de la République, au CGLPL ou à l’OIP.

Le tribunal administratif condamne l’Etat, en janvier 2017, pour des fouilles à nu systématiques au centre pénitentiaire de Poitiers-Vivonne. 1 000 € de dommages et intérêts sont accordés à la personne détenue qui dénonce sept fouilles dans cet établissement.

La violence entre codétenus

Les agressions recensées entre personnes détenues sont, en 2016, au nombre de 8 161 agressions et les homicides de six.

La violence est exacerbée par la surpopulation et la promiscuité, les choix récents de conception des établissements (architecture, limitation des contacts entre surveillants et détenus, grande taille des prisons).

Un jeune homme détenu de 22 ans s’enfuit du centre pénitentiaire d’Uturoa début mars 2017 pour échapper à ses codétenus : “J’ai eu peur des autres prisonniers, ils me font laver leur linge, m’empêchent de m’asseoir, me traitent comme leur esclave”.

Ramses Aly Elsayed, un franco-égyptien de 21 ans, est brutalement projeté au sol, à la mi-décembre, à la prison des Baumettes à Marseille. Il reçoit des coups de pied dans la tête.
Ce n’était pas un méchant. Mais il avait des problèmes psy et faisait du bruit la nuit. Ça énervait du monde”, rapporte un détenu. “Il était du genre à répondre crûment”, confie un proche du dossier. Le premier détenu témoigne que “la prison Baumettes 2, comme l’historique, est désormais livrée à la loi de la jungle! Beaucoup ne sortent même plus en promenade et préfèrent rester la journée dans leur cellule”.
Les gardiens auraient mis au moins 20 minutes à venir secourir la victime. Un corps inerte dans un coin de la cour. “Pendant qu’il se faisait massacrer, des prisonniers criaient de la fenêtre : ‘Arrêtez ! Arrêtez !, *a raconté le témoin. *Mais personne n’est intervenu alors que le lynchage ne s’est pas déroulé dans un angle mort. Mais à un endroit filmé. Il s’est fait tuer, massacrer gratuitement. Le problème, c’est que le personnel se dit en sous-effectif et n’intervient plus.
Il décède à l’Unité hospitalière sécurisée interrégionale (UHSI) le 3 janvier 2018.